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Simulations, modélisations - Page 7

  • Comptabiliser les morts en temps de guerre, ou lors d'une catastrophe naturelle

    Les chiffres arrivent au fur et à mesure. Ils varient d'un média à l'autre. Les différentes sources donnent parfois des estimations qui peuvent varier du simple au double. Elles peuvent même être revues plusieurs fois par jour.

    Le tremblement de terre d'Haïti vient une fois de plus nous replonger dans le triste calcul mais pourtant nécesssaire du nombre de victimes. En mai 2008, un cyclone a fait 100 000 morts en Birmanie. Les estimations des morts de la seconde guerre mondiale donnent des chiffres variant  entre 41 et 70 millions ( voir
    Des matheux pour compter les morts ). Les chiffres peuvent servir à mesurer l'ampleur de l'aide, à infléchir des politiques ou même servir d'argument juridiques.


    La méthode de comptabilisation doit être scientifique pour que le nombre estimé soit le plus proche possible du nombre réel. Les techniques utilisées font appel au témoignage, au constat aussi bien qu'à l'observation par satellite pour par exemple, imputer à d'autres villages détruits de façon identiques, le taux de mortalité constaté sur l'un d'entre eux. Il reste aussi à prévoir les dégats que causeront les épidémies qui se propageront à la suite de la catastrophe.

    Article en anglais à consulter: How will they count the dead in Haïti? Source ( @StatFr)


    Haiti Earthquake

    Vue aérienne du bâtiment des Nations Unies en Haïti après le tremblement de terre de 2010.
    Source: ONU

  • Une marche au hasard au Texas entre les primes pour les bons enseignants et le licenciement des mauvais

    http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/61884.htm

    J'ai lu un livre très intéressant pendant ces vacances de fin d'année : "The Drunkard's Walk", de Leonard Mlodinow. L'auteur de cette "Promenade de l'Ivrogne" est un physicien qui, après avoir décroché un doctorat en physique théorique à Berkeley et une bourse de la Fondation Alexander von Humboldt à l'Institut Max Planck de Munich, a écrit des scénarios pour la télé et le cinéma (Hunter, MacGyver, Star trek: The Next Generation), puis a produit des jeux vidéos, pour finalement revenir dans le monde académique en 2005 comme enseignant au California Institute of Technology.

    La thèse du livre est simple : notre vie est dominée par le hasard, mais notre cerveau étant programmé pour reconnaître des schémas (patterns), nous sommes incapable de voir l'aléatoire là où il se manifeste. Prenons l'un des mythes du monde moderne : le mérite. "Les gens ignorent systématiquement le rôle du hasard dans le succès des entreprises et des individus", écrit Mlodinow. Vous souvenez-vous de Stanley O'Neal ? Une parenthèse : comment reconnait-on le mérite, de nos jours ? Grâce au salaire, bien sûr. Si on est très bien payé, on est très bon. M. O'Neal a gagné 48 millions de dollars en 2006, et 46 en 2007. Plus que très bon. Un génie. Sans aucun doute. A tel point que, en quittant son poste à la fin de 2007, M. O'Neal a été remercié pour ses bons services avec un supplément d'environ 160 millions de dollars. Et que personne ne dise que le mérite n'existe pas ou qu'il n'est pas bien récompensé.

    Pourquoi, alors, CNBC a-t-elle classé Stan O'Neal parmi les Plus Mauvais PDG Américains de Tous les Temps ? Parce que O'Neal est le PDG responsable de l'entrée de la firme de consultants financiers Merrill Lynch dans l'arène des sub-primes, ce qui a causé à l'entreprise des pertes de 8 milliards de dollars. Les 160 millions de dollars sont la prime du licenciement qui a suivi ce désastre. Génie ou idiot, nous demande implicitement Mlodinow ? Si l'on juge O'Neal sur la base de ses résultats, on doit conclure que le génie peut évoluer vers l'idiotie en l'espace de quelques mois. Si, par contre, les succès anciens et les insuccès récents de M. O'Neal sont dus au hasard, quel mérite est-on en train de récompenser par des millions de dollars ?

    Je réfléchissais à cette histoire de mérite vs. hasard, quand mon attention a été capturée par un article du Houston Chronicle : "HISD may fire teachers over test scores". Le Rectorat de Houston (Houston Independent Schools District) pourrait mettre à la porte des enseignants sur la base des résultats (des élèves) aux tests.

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  • La phénologie au service des prévisions météorologiques pour l'agriculture

    http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/61810.htm

    Les changements climatiques inquiètent de plus en plus, non seulement les scientifiques mais également le monde agricole, notamment en raison des impacts qu'ils ont ou auront sur les pratiques culturales. D'après les climatologues, les changements climatiques ont eu pour conséquence un bouleversement planétaire des rythmes saisonniers. En effet, comparé à la situation quelques décennies en arrière, le printemps est plus précoce, ce qui entraîne notamment une floraison anticipée des plantes. Pour comprendre l'impact de ces phénomènes, les chercheurs tentent de mettre au point des modèles mathématiques permettant de prédire les effets éventuels des bouleversements météorologiques sur les cultures. Nous avions déjà abordé ce thème dans un précédent bulletin qui exposait les travaux de recherche de scientifiques de l'ARS (Agricultural Research Service) et de la NOAA (National Oceanic and Atmospheric Administration), lesquels ont mis au point des modèles numériques pour l'aide à la décision agricole (date des pâtures, estimation des rendements, etc.) en lien avec le climat. Ce projet avait pour but de fournir aux exploitants des données locales les plus pertinentes, à savoir des variations à court terme ou des ruptures par rapport aux moyennes à long terme.

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  • Créer un cancer virtuel

    Normal_cancer_cell_division_from_NIH.pngLe cancer est l'une des causes majeures de décès dans le monde (en particulier dans les pays en développement), avec environ 11 millions de personnes diagnostiquées et environ 7 millions de personnes qui meurent chaque année. Les prévisons de l'Organisation mondiale de la santé  sont d'environ 9 millions de morts en 2015 et de  11,5 millions de décès en 2030 par cancer.

    Le cancer est un sujet très important de la recherche médicale, mais de façon assez inattendue aussi de la recherche en mathématiques appliquées.

    Le processus démarre avec la division incontrollée de quelques cellules. les déchets sont expulsés à la surface de la tumeur. Une fois que la tumeur atteint une certaine taille les propriétés des bords de la tumeur se modifient en raison de l'importance des déchets. Elle devient plus agressive.

    Les mathématiques sont déjà utilisées pour modéliser la croissance de tumeurs cancéreuses dans la phase pré-invasive. Une équipe de l'université de Dundee est en train de concevoir un modèle global de croissance. Un tel modèle doit fonctionner sur plusieurs niveaux, sub-cellulaire, cellulaire et macroscopique. L'objectif de ce projet est de simuler un cancer virtuel afin d'améliorer les traitements.

    La partie continue du modèle serait composée d'un système d'équations de réaction-diffusion modélisant les modifications de concentration des substances chimiques libérées dans les cellules de la tumeur et les tissus environnants  les changements qui en résultent pour les tissus et  la tumeur.

    Ce sont visiblement des équations identiques à celles permettant de modéliser la diffusion des pigments donnant naissance aux tâches et rayures du pelage de certains animaux.


    L'article complet ( en anglais) sur Plus magazine

  • Mon avis sur " Les métamorphoses du calcul" de Gilles Dowek

    les métamorphoses du calcul.jpgTrois jours de stage et six heures de train pendant lesquelles j'ai dévoré ce livre. Gilles Dowek a reçu le Grand Prix de Philosophie 2007 décerné par l'Académie Française. Je ne connais pas les autres lauréats mais pour ce qui est de ce livre je pense que la philosophie a vraiment trouvé du grain à moudre pour quelques années dans ces métamorphoses numériques.

    Au début du livre, j'étais en territoire connu mais j'ai déjà lu beaucoup de livres sur l'histoire des mathématiques alors j'ai pensé, tiens encore une histoire des maths. C'est vrai pour le tout début du livre mais la première partie est nécessaire à quiconque ne maîtrise par bien ce sujet afin d'introduire la logique des prédicats.

    Et puis dès la cinquantième page, je vois apparaître mon copain Kant et ses jugements synthétiques à priori. Alors je commence à me dire que ça va cogner. On pourra d'ailleurs lire le documents suivant : La philosophie des mathématiques de Kant . Quel est le problème?

    Kant propose deux types de jugements :

    Analytique si une proposition est vraie par définition comme "un triangle à trois cotés".

    Synthétique si la propostion est vraie sans que ce soit une définition. Par exemple "La terre a un satellite" . Ce jugement peut être a priori si on peut le concevoir dans la tête ou a poseriori s'il faut une intéraction avec la nature.

    Les jugements analytiques semblent quant à eux exclusivement à priori.

    Pour Kant le raisonnement se situe dans les jugements synthétiques à priori mais c'est là que ça coince par ce que ce n'est pas aussi simple que ça!

    Le "simple", 2+2=4 pose problème. Frege va d'ailleurs montrer que 2+2=4 peut se déduire de la définition des nombres entiers et doit être classé parmi les jugements analytiques et non parmi les jugements synthétiques à priori.

    On voit déjà poindre à l'horizon une problématique philosophique centrale concernant les mathématiques, leur constitution et leur évolution. Se constituent-elles au sein d'elles mêmes auquelles cas elles sont analytiques à partir des simples définitions. Relèvent-elles du jugement synthétique à priori ou doivent-elles aller chercher des éléments dans la nature pour se construire.

    Il est inutile de vouloir répondre simplement à ces questions qui dépendent de l'évolution des mathématiques elles mêmes dont le pivot central est certainement la thèse de Church des années 30, affirmant l'identité entre la notion de calcul "informatique et la notion "commune " de calcul que nous avons.

    En avançant encore un peu dans le livre on voit apparaitre l'idée selon laquelle Démonstration = Algorithme et puisque la thèse de Church nous donne Algorithme = Calcul, on a donc l'identité Démonstration = Calcul. Il devient donc nécessaire de distinguer les notions de démontrable et d'explicatif, ce qui est loin d'être facile pour les mathématiciens. La longueur des démonstrations est aussi abordée, avec par exemple la problèmatique suivante : Peut-on démontrer qu'un problème démontrable possède une démonstration "courte"?

    Philosophiquement le sujet est dense!

    D'autant qu'à la fin de l'histoire une surprise de taille nous attend avec un retour nécessaire à la nature... Mais je n'en dis pas plus.

    Ce qui m'a aussi passioné dans le livre est le traitement du rapport du mathématicien et de la machine, de ce nouvel outil qui lui est maintenant indispensable. L'auteur s'interroge aussi sur le fait que l'ordinateur du mathématicien est le même que celui de Mme Michu, sauf bien sûr si les calculs sont vraiment très très longs et demandent un super-calculateur pour pouvoir être faits  en un temps "raisonnable". Il est intreressant de comprendre quelles est la place de l'ordinateur-machine à coté du mathématicien-humain.

    J'ai extrait quelques courtes citations vers la fin du livre qui me semblent assez explicites sur les métamorphoses du calcul qui est le sujet du livre et donc des mathématiques elles-mêmes:

    En 1976, les mathématiques sont entrées dans la période instrumentée de leur histoire. Les instruments utilisés par les mathématiciens, ne sont pas des instruments qui prolongent les facultés de nos sens, mais qui prolongent les capacités de notre entendement: notre faculté de raisonner et surtout, de calculer. ( p 182 )

    L'utilisation d'instruments commence, de même à changer, les mathématiques. ( p 182 )

    La maquette sur laquelle on fait l'essai est donc une machine à résoudre un problème mathématique,[...] (p 188)

    L'entrée des mathématiques dans leur ère instrumentée incite donc, non à accorder une confiance excessive dans les instruments utilisés, mais à restreindre prudemment la confiance parfois exagérée, que nous avons en nous-mêmes: nous aussi nous pouvons faire des erreurs. (  p 191 )


    Podcast de Gille Dowek sur le livre et sur Canal-Académie

     

    Pour compléter :

    Des p'tits problèmes de coloriage ( autour du théorème des quatre couleurs)