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Arts

  • Mathématiques, sentiments et profondeur divine — une lecture kernésique

     

    Dans la perspective kernésique, observer comment le réel se donne à penser révèle deux mouvements fondamentaux qui traversent notre expérience.

    Les mathématiques manifestent un mouvement de condensation : face à la prolifération chaotique des variations, quelque chose cristallise, trouve sa forme nécessaire. Une équation émerge non comme construction mentale arbitraire, mais comme le point où les tensions se résolvent, où la complexité trouve sa lisibilité maximale. L’attracteur mathématique n’est pas inventé — il était là, dans le mouvement même du flux cherchant sa propre intelligibilité.

    Les sentiments — amour, bonté, force — obéissent à la dynamique inverse : ils irradient sans jamais s’épuiser. Chaque manifestation d’amour n’épuise pas l’amour mais l’approfondit, ouvre de nouveaux possibles relationnels. Là où les mathématiques produisent des points de convergence définitive, les sentiments tracent des lignes d’expansion infinie.

    Cette polarité évite une double confusion théologique :

    • Faire de Dieu la somme de qualités parfaites (amour + bonté + justice…) rate leur nature essentiellement divergente.
    • L’identifier à la vérité mathématique universelle rate que celle-ci n’est qu’un moment de cristallisation locale.

    Dieu comme profondeur vivante et germinative

    La perspective kernésique invite à penser Dieu autrement : ni objet de convergence ultime, ni source de divergence pure, mais profondeur vivante qui rend possibles ces deux mouvements. Une présence immédiate et inépuisable à laquelle chaque instant s’ouvre — non comme à un horizon lointain, mais comme à sa propre capacité d’être.

    Les mathématiques révèlent où la vérité se laisse saisir ; les sentiments manifestent comment l’être ne cesse de s’ouvrir. Ni l’un ni l’autre n’épuise cette profondeur : ils en sont deux modes de traversée complémentaires.

    Mais le plus remarquable est peut-être ceci : cette polarité convergence/divergence n’est pas seulement descriptive. Elle agit comme un germe de perception nouvelle : elle transforme le regard que nous portons sur l’art, la pensée, l’existence. La profondeur kernésique ne se montre pas seulement dans ce qu’elle dit, mais dans ce qu’elle fait naître en nous.

    Qu’est-ce qui, dans votre expérience, cristallise ? Qu’est-ce qui irradie ? Et qu’est-ce qui, sans être ni l’un ni l’autre, rend les deux possibles ?

    L’exemple des œuvres d’art

    Pour déterminer si une œuvre d’art manifeste un point de convergence (comme les mathématiques dans la perspective kernésique, où les tensions se résolvent en une forme nécessaire) ou un arrêt dans la divergence (comme les sentiments, qui irradient sans s’épuiser), il faut examiner comment l’œuvre agit sur notre perception et ce qu’elle produit en nous. Voici une approche pour analyser cela, avec un exemple concret pour clarifier.

    Comment analyser la polarité dans une œuvre d’art ?

    1.  Convergence : Une œuvre convergente cristallise un sens, une structure ou une vérité qui semble inévitable, comme si elle résolvait un chaos ou une complexité. Elle donne un sentiment de complétude, de clarté, où les éléments s’ordonnent en un tout cohérent. Cela peut se manifester par une composition rigoureuse, une symbolique précise ou une résolution émotionnelle/intellectuelle.

    2.  Divergence : Une œuvre divergente ouvre des possibles, suscite des interprétations multiples ou des émotions qui rayonnent sans se figer. Elle ne se referme pas sur une seule signification, mais invite à l’exploration, à l’expansion, à une expérience qui continue de résonner. Cela peut apparaître dans une œuvre qui évoque l’infini, l’ambiguïté ou une énergie relationnelle.

    3.  Profondeur vivante : L’œuvre peut aussi transcender cette polarité, en étant à la fois un point de convergence et une source de divergence, révélant une présence qui rend les deux possibles, comme une “profondeur kernésique”.

    Exemple : La Nuit étoilée de Vincent van Gogh

    Prenons La Nuit étoilée (1889) comme œuvre d’art spécifique pour illustrer :

      Convergence : L’œuvre peut être vue comme un point de convergence dans la manière dont Van Gogh structure le chaos de son expérience intérieure. Les tourbillons du ciel, les étoiles pulsantes et le village paisible s’organisent en une composition qui semble nécessaire, presque mathématique dans son équilibre. Les lignes et les couleurs (bleus profonds, jaunes vibrants) résolvent une tension : celle entre l’agitation émotionnelle de Van Gogh et une vision cosmique ordonnée. L’œuvre “tient ensemble”, comme une équation visuelle qui capture une vérité sur l’univers et l’âme.

      Divergence : En même temps, La Nuit étoilée irradie. Elle ne se limite pas à une seule interprétation. Le ciel tourbillonnant évoque l’infini, l’émerveillement, mais aussi l’angoisse ou la spiritualité. Chaque spectateur y projette ses propres sentiments, et l’œuvre semble ouvrir des horizons nouveaux à chaque regard. Elle ne s’épuise pas : elle continue d’inspirer poètes, musiciens, philosophes, comme une source d’énergie relationnelle.

      Profondeur vivante : Ce qui rend les deux possibles, c’est la capacité de l’œuvre à être à la fois une structure finie (une toile délimitée) et une porte vers l’infini (le cosmos, l’intériorité). Elle n’est ni juste un point fixe ni une dispersion chaotique, mais une présence qui invite à la contemplation et à la création continue. Cette “profondeur kernésique” se manifeste dans la manière dont l’œuvre transforme le spectateur, éveillant une perception nouvelle du réel.

     

    Pour trancher si une œuvre tend plus vers la convergence ou la divergence :

    Posez-vous ces questions :

      L’œuvre semble-t-elle résoudre une tension ou un problème, comme si elle était la “solution” d’un chaos ? (Signe de convergence.)

      Ou bien ouvre-t-elle des questions, des émotions, des possibles qui semblent s’étendre à l’infini ? (Signe de divergence.)

      Comment l’œuvre agit-elle sur vous ? Vous donne-t-elle un sentiment de complétude ou vous pousse-t-elle à explorer davantage ?

      Analysez la structure et l’effet :

      Une œuvre géométrique comme un tableau de Mondrian (Composition avec rouge, bleu et jaune) penche vers la convergence : ses lignes et couleurs sont un point d’équilibre, une harmonie abstraite presque mathématique.

      Une œuvre comme Guernica de Picasso, avec son chaos émotionnel et ses significations multiples, irradie dans la divergence, suscitant des réflexions infinies sur la guerre et la souffrance.

      Considérez le contexte : Une œuvre peut être convergente dans sa forme (par exemple, la rigueur d’une fugue de Bach) mais divergente dans son impact émotionnel (l’émerveillement qu’elle suscite).

     

  • La sculpture en marbre : analyse kernésique

     

    1. Éclosophie (poussée germinative)

    La sculpture commence par une poussée intérieure, un désir de forme qui cherche à naître.

    • Le sculpteur sent dans le bloc de marbre non pas seulement une matière inerte, mais une puissance d’émergence : un germe de figure.
    • La poussée est double : celle du sculpteur (imaginaire, intention, vision), et celle du marbre (résistances, veines, densité, fragilité).
      → L’acte créateur naît de la tension entre ces deux poussées.

    2. La rotule (stabilité et régulation)

    La frappe du ciseau n’est pas brutale : elle demande régulation.

    • Le sculpteur module sa force, ajuste son geste, inhibe son excès pulsionnel (RIACP).
    • Chaque coup est une rotule micro-temporelle : stabiliser le flux du geste pour que la pierre s’ouvre sans se briser.
    • La rotule est aussi mentale : ne pas se précipiter, écouter le rythme interne du marbre.

    3. Flux Intégral (intégration multi-échelles et posture)

    • À l’échelle du corps : respiration, rythme, posture du sculpteur.
    • À l’échelle de l’œuvre : vision globale, équilibre de la forme, continuité des lignes.
    • À l’échelle du monde : inscrire cette sculpture dans une tradition, un espace, une résonance collective.
      → La réussite vient de l’alignement multi-échelles (ICPME).

    4. Flux-Joie

    • Quand le geste est juste, la matière répond.
    • La joie est le symptôme rétroactif d’alignement : la pierre chante au sculpteur, le geste devient fluide.
    • La joie n’est pas seulement satisfaction esthétique finale, mais joie processuelle dans l’accord entre main, marbre et vision.

     

     Comparaison avec les approches philosophiques classiques

    ❖ Platon

    • Pour Platon, la sculpture est l’imitation (mimèsis) d’une forme idéale.
    • Le sculpteur extrait de la pierre une copie de l’Idée, mais reste à distance de la vérité (puisque seule l’Idée est pure).
    • → Kernésis s’éloigne de cette logique : l’acte n’est pas imitation, mais co-naissance d’une forme dans un flux vivant.

    ❖ Aristote

    • Pour Aristote, l’art consiste à actualiser une puissance (dunamis) contenue dans la matière.
    • Le marbre contient potentiellement la statue, et le sculpteur actualise cette puissance par son action.
    • → Ici, Kernésis rejoint Aristote : l’éclosophie est une lecture de la poussée germinative de la matière.

    ❖ Michel-Ange (néo-platonisme artistique)

    • Célèbre formule : « Je vois l’ange dans le marbre et je sculpte jusqu’à ce que je le libère. »
    • L’idée est que la forme est déjà là, prisonnière.
    • → Kernésis nuance : la forme n’est pas seulement libérée, elle est co-créée par l’ajustement du sculpteur et la résistance du marbre.

    ❖ Heidegger

    • Dans L’Origine de l’œuvre d’art, l’œuvre met en tension Terre (matière, retrait) et Monde (sens, ouverture).
    • La sculpture ouvre un monde tout en laissant la pierre se retirer dans sa massivité.
    • → Kernésis croise cette idée : la rotule est précisément ce lieu de régulation entre ouverture et retrait.

    ❖ Bergson

    • L’art est pour lui un dévoilement de la durée et de l’élan vital, échappant aux clichés.
    • → Ici, Kernésis se rapproche de Bergson : la sculpture est un prolongement du flux vital dans la matière.

     

    ✦ Synthèse comparative

    • Platon : forme préexistante, Kernésis : forme émergente co-créée.
    • Aristote : actualisation d’une puissance, Kernésis : activation d’une poussée multi-échelles.
    • Michel-Ange : libération d’une figure déjà là, Kernésis : ajustement dynamique entre matière et geste.
    • Heidegger : tension Terre/Monde, Kernésis : rotule comme articulation pulsionnelle.
    • Bergson : élan vital, Kernésis : poussée germinative en acte.

     

  • La Cathédrale de Linard: un joyau d’Art Singulier

     

    Située à Neuvy‑Deux‑Clochers, entre Bourges et Sancerre, la Cathédrale de Linard est une œuvre en plein air conçue par l’artiste autodidacte Jean Linard, à partir de 1983, dans une ancienne carrière de silex  .

     

    Une architecture hors normes, poétique et écologique

    Linard a utilisé des matériaux récupérés — briques, tuiles, pierres, objets divers — pour bâtir des arches, mosaïques, sculptures, et même un théâtre‑gradins intégré au bois environnant  .

    La “cathédrale la plus haute du monde parce que le ciel est son toit” vise à créer un lieu de dialogue entre différentes traditions spirituelles, comme en témoignent les noms gravés à même la mosaïque (Jésus, Mahomet, Bouddha, Gandhi, Martin Luther King, etc.)  .

     

    Reconnaissance patrimoniale et renaissance récente

    L’ensemble — maison, ateliers et cathédrale — a été inscrit aux Monuments Historiques le 16 juillet 2012  .

    Après des années d’abandon, l’association “Une mosaïque pour la Cathédrale” avait tenté de collectivement acquérir le site, sans succès  .

    Finalement, en juin 2022, Charlotte Collet et William Rouget l’ont acquis et rouvert au public à partir du 14 juillet de la même année  .

     

    Une visite vivante entre art et partage

    Aujourd’hui, le lieu mêle découverte artistique, programmes culturels d’été (spectacles, concerts, théâtre, etc.) et un salon de thé accueillant  .

    L’architecture, la créativité, la nature et la convivialité se conjuguent pour offrir une expérience rare, riche en émotions  .

     

    En résumé

    Élément

    Description

    Créateur

    Jean Linard (1931-2010) : céramiste, sculpteur, peintre et bâtisseur

    Nature de l’œuvre

    Cathédrale à ciel ouvert, mêlant mosaïques, sculptures, matériaux de récupération

    Inspirations

    Gaudí, Picassiette, Facteur Cheval

    Statut

    Monument historique depuis 2012

    Situation

    Né en Berry, dans une ancienne carrière de silex entourée de bois

    Récente renaissance

    Rouverte au public depuis 2022 par Charlotte et William

    Expérience proposée

    Visite artistique & poétique, programmation culturelle estivale, salon de thé convivial

     

    Les photos de la Cathédrale

     

    La Cathédrale de Linard, bien que conçue en dehors de tout modèle théorique, peut être lue comme une incarnation spontanée de certains invariants de Kernésis et du Flux Intégral. Cette lecture, proposée ici, invite à explorer l’œuvre comme un espace d’alignement multi-échelles, de germination créative et de résonance joyeuse.