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La Recherche - Page 13

  • Russell, Carroll, Galton, Poincaré et les autres en milliDarwin

    Imaginons que l'on veuille se donner une unité de mesure de la fréquence d'apparition du couple "Prénom Nom" d'un scientifique (dans cet ordre avec les majuscules initiales) sur la période 1800 à 2000. On pourrait par exemple choisir le milliDarwin, c'est à dire que 1 milliDarwin signifirait que le nom apparait mille fois moins que celui de Darwin dans les publications ou plutôt dans la base de données formée par les mots des 15 millions d'ouvrages numérisés par Google.

    C'est l'idée qu'a eu un étudiant de Harvard: John Bohannon et qui a mené le projet de classer les scientifiques, par fréquence d'apparition de leur nom, dans cette gigantesque base de données, baptisé "The science hall of fame".

    Avant la lecture de ce classemeBertrand_Russell_1950.jpgnt, j'aurai imaginé de façon assez naturelle que Darwin aurait été le premier et Einstein le second mais un invité logicien, mathématicien, philosophe, homme politique, prix Nobel s'est invité en première place: c'est Bertrand Russell, que certainement le grand public ne connait pas ou peu, en tout cas beaucoup moins qu'Einstein et Darwin. Il est à 1500 milliDarwin, c'est à dire qu'il apparait 50% de fois plus que Darwin, son successeur.

    On retrouvera Bertrand Russel en BD dans l'excellent Logicomix, comme narrateur. 

    Non loin de lui se retrouve à la quatrième place, Lewis Carroll, l'auteur d'Alice au pays des merveilles, plus connu comme écrivain que comme logicien.

    Francis Galton, est bien connu pour sa planche et fait bonne figure à la 12ème place.

    Henri Poincaré, comptabilise 108 milliDarwins.

    L'idée de ce billet provient de l'éditorial de l'excellent "La Recherche" de Mars 2011 écrit par Aline Richard et c'est vraiment une excellente idée!

  • Les mathématiques comme langage

    Les mathématiques se construisent avec deux modes de raisonnement dissemblables: un coté "soft" abordant les idées et les analogies et un coté "hard", concernant les vérifications. Le coté "hard" est le plus facile à cerner. Il concerne en premier lieu, les preuves "formelles", composée chacunes d'une série d'assertions. Un mathématicien peut vérifier si la démonstration est correcte en la parcourant, pas à pas, et en testant si chacune des étapes suit la précédente à partir de faits déjà démontrés de façon correcte.

    Le coté "soft" est le moins facile à décrire. Il est formé d'intuitions sur les objets formels construits dans les démonstrations mathématiques; d'idées qu'une partie des mathématiques peut correspondre de façon analogique à une autre partie des mathématiques; ou aussi d'analogies entre les objets mathématiques et le monde physique.

    Par exemple, si vous voulez montrer que deux objets sont similaires, il est parfois plus facile de montrer indirectement qu'ils le sont tous deux à un troisième.

    Le langage que les mathématiciens utilisent dans les livres et les articles comble le fossé entre ces deux modes de raisonnement.  Il est difficile,  pointilleux et présente des démonstrations rigoureuses; mais il tente aussi de transmettre subtilement, d'éphémères et intangibles idées "soft" à l'intérieur de sa constitution "hard", au travers d'analogies, d'allusions et d'autres moyens indirects. Ces idées "soft" sont rarement exposées en quelques mots; on ne trouve que très rarement une phrase qui peut résumer à elle seule toutes les idées contenues dans une preuve. Mais un texte mathématique technique et précis peut construire lentement une toile d'éphémères et intangibles concepts par un choix pertinent de mots, traçant des parallèles entre les différentes parties de mathématiques et des sens similaires. Ainsi, un homme mathématicien peut-il se laisser conduire par le texte jusqu'aux idées sous-jacentes. Et, in fine, ce sont ces idées "soft" qui constituent la matière. Le contenu "hard" est important car il rend objectif et vérifiable, mais ce sont les idées "soft" qui sont le centre des mathématiques, ce que les mathématiciens recherchent.

     

     001009biology-linguistic-computerPhoto: Cesarharada.com

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  • Les mathématiciens sont-ils en danger?

    220px-watsons_avatar.jpg?w=130En anglais "en danger" se dit "Jeopardy". Et "Jeopardy" c'est un jeu télévisé dans lequel il faut retrouver la question à partir de la  réponse donnée par le présentateur. Il y a peu de temps ce jeu a été gagné par un certain Watson face aux deux meilleurs concurrents du jeu.

    Elémentaire mon cher Watson! (désolé je ne pouvais pas ne pas la faire... et si vous ne connaissez pas la bande son de Sherlock Holmes de Hans Zimmer, peut-être pouvez-vous faire un petit tour sur Deezer , personnellement j'ai adoré)

    Ce qu'il est important de préciser c'est que Watson est en fait un ordinateur développé par IBM...

    Peut-être pouvons nous reprendre une chronologie de l'histoire et peut-être émettre quelques hypothèses.

    10 février 1996: Deep Blue, un ordinateur développé par IBM bat Garry Kasparov aux échecs. La première manche est remportée par Kasparov et la seconde par Deep Blue en 1997, Kasparov, fatigué, abandonna la dernière partie en 19 coups.

    26 mai 2010: Une version stable de Ribka est commercialisée. C'est un jeu d'échec qui tourne sur un ordinateur de bureau. Il est classé Elo à 3110 points alors que le classement des meilleurs humains est autour de  2800.

    16 février 2011: Watson, un ordinateur développé par IBM, bat les deux meilleurs joueurs du jeu Jeopardy! faisant intervenir le langage naturel.

    23 octobre 2015: Un logiciel baptisé Omni répond à toutes les questions de culture générale posées en langage courant.

    30 décembre 2015: Le recours à Doc, un logiciel médical, est généralisé pour réaliser des diagnostics complexes.

    10 janvier 2026: Cosx, un ordinateur développé par IBM parvient à résoudre la conjecture de Riemann en publiant la démonstration sur une centaine de pages.

    10 ans plus tard...


    Plus sur Watson:

    L'article de Futura-Sciences

    For Watson Jeopardy! Victory was elementary

  • Vous reprendrez bien un peu de 0?

    En maths, on utilise un mot assez mystérieux, qui l'est pour les non-matheux mais surtout pour les matheux, il s'agit du mot "conjecture".

    La conjecture, c'est la chose que le matheux sent vraie mais qu'il n'arrive pas à démontrer, soit parce que c'est très difficile et qu'il existe très peu (ou pas) de mathématiciens ayant le niveau pour faire la démonstration, soit parce qu'il n'y a tout simplement pas de démonstration, soit parce que les maths ne sont pas encore assez évoluées pour la faire.

    La conjecture est d'autant plus sympa qu'elle s'énonce facilement et qu'elle résiste à l'assaut des mathématiciens.

    En voilà une petite (enfin c'est un point de vue personnel).

    Prenons les nombres entiers suivants :

    1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 13, 14, 15, 16, 18, 19, 24, 25, 27, 28, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37, 39, 49, 51, 67, 72, 76, 77, 81, 86.

    Calculons les puissances de 2 de ces nombres :

    21=2

    22=2x2=4

    23=2x2x2=8

    24=2x2x2x2=16

    234=2x2x2x2x…x2=17179869184

    286=77371252455336267181195264

     

    Anne, ma soeur Anne, ne vois-tu rien venir?

    Ben si justement, regarde:

    287=154742504910672534362390528

    C'est ça la conjecture!

    86 est semble être le plus grand entier dont l'écriture décimale de sa puissance de 2  ne contient aucun 0. [A007377].

    Dialogue entre un Solognot et un Orléanais:

    Pôrce que les matheux y zon bien assayé de calculer les puissances de 2 de 87 jusqu'ô 47 000 000 et y zon  toujours trouvé des 0 adedans.

    Certes, nous pourrions continuer ainsi plus longtemps, très cher, mais voyez-vous, la probabilité de ne pas trouver de 0 après, est comme qui dirait... minuscule : 1.764342396 ⋅10-633620 .

    Fin du dialogue.

    Personnellement, j'ai bien une démonstration mais je ne voudrais pas vous ennuyer avec ça.

    Billet moyen réalisé à partir de cet excellent billet.

  • Les mots aident nous aident à former les concepts mathématiques

    Le sujet est épineux. Quels rapports entretiennent les concepts mathématiques et les mots qui les définissent, ou plus exactement avec l'image mentale qui se construit lorsque l'on utilise des mots? Stella Baruk a abordé un aspect de cette question, en pointant les mélanges et confusions qui pouvaient se produire en associant les concepts mathématiques à des mots ainsi qu'en formulant des problèmes à contenu mathématique en langage courant (ou supposé comme tel).

    Une équipe de l'Université de Chicago a réalisé une expérience très intéressante qui va certainement permettre de nombreuses autres avancées ultérieures. Les recherches ont été faites sur une population de sourds du Nicaragua qui  n'ont jamais appris le langage des signes et qui communiquent entre eux avec des gestes qu'ils ont développé eux-mêmes que l'on appellera autosigneurs. Ils sont dans l'incapacité de comprendre la valeur de nombres plus grands que trois parce qu'ils n'ont pas développé de signes associés.

    En revanche, les personnes sourdes qui apprennent la langue des signes classique comme les enfants, peuvent apprendre le sens des grands nombres. Les chercheurs pensent que c'est parce que les langues contiennent des signes conventionnels, comme la langue parlée, que les enfants peuvent apprendre très tôt la routine du comptage.

     

    sourd_001.png

    Vidéo montrant une personne sourde autosigneuse qui ne comprend pas les nombres supérieurs à trois en ne parvenant pas à faire correspondre un nombre de pions avec le  nombre de coups qu'elle reçoit sur la main.

    L'étude illustre la complexité de l'apprentissage des relations symboliques inscrites dans le langage, y compris le simple concept de nombre. Le travail effectué pourra aider les chercheurs à mieux comprendre comment le langage façonne la manière dont les enfants aprennent les concepts mathématiques de façon précoce et comment ce processus crucial se déroule pendant la période préscolaire. 

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