Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Paradoxes, limitations,erreurs - Page 8

  • 1125899906842624 dessins

    Avec 50 cases à cocher, affichant chacune un dessin ou un autre, vous pouvez réaliser exactement 250 jolis dessins. C'est ce que propose Wolfram ICI.

     

     

    puissance de 2.jpg

     

    Sachant que vous allez regarder à peu près un dessin par seconde, combien de temps devrez-vous avoir devant vous pour les regarder tous ?
    Impressionnant non ? Allez on se dépèche, et je suis d'accord pour repousser l'interro la semaine prochaine :)

     

     

     

  • Il était une fois les mathématiques...

    Il était une fois, il y a bien longtemps de cela, la Philosophie embrassait toutes les Sciences. Certes ce que l'on appelait Science autrefois n'avait qu'un lointain rapport avec la façon dont on les pense maintenant. Les mathématiques étaient, suivant l'usage que l'on en faisait, la philosophie que l'on choisissait, préalables à toute connaissance ou détenaient au contraire une faible valeur probatoire en rapport de la Physique. L'essentiel était qu'elles soient bien au chaud sous la coupe de mère Philosophie et qu'elles alimentent les dialogues où le mathématicien se trouvait être, selon la situation, maître du monde de la connaissance ou artisan de l'inutile. Dans chacun des deux cas, la simple connaissance de l'existence du mathématicien suffisait et il fallait laisser à ces spécialistes ou à quelques illuminés, la tâche ingrate de faire des mathématiques. Et puis vient petit à petit l'idée grandiose que l'investigation rationnelle de la nature ne pouvait se faire qu'en respectant une méthode rigoureuse et quasi-mathématique. La Philosophie devait réserver une place de choix, un espace de plus en plus grand aux mathématiques qui ne cessaient de grandir et de mûrir. Les choses commencèrent à s'améliorer nettement pour notre Mathématique et leurs représentants. L'ensemble prit d'ailleurs tellement de place qu'ils durent se séparer de la trop encombrante et lourde philosophie pour pouvoir se développer librement. La Mathesis Universalis prenait son envol. De l'enseignement des plus jeunes enfants aux grands corps d'Etat, il n'était pas d'endroit ( au moins en France ) qui ne voyait pointer le bout du nez de la Reine des Sciences. Alors les mathématiciens s'habituèrent petit à petit à parler plus forts entre eux, fiers de leur position dominante, de toutes ces choses importantes que l'on ne pouvait saisir qu'à la condition d'une pratique intensive et exigeante. Et puis vint le temps de la Grande Harmonisation, qui malgré quelques échos qui s'entendaient déjà bien forts d'une impossible puissance infinie, se fit et emporta aussi avec elle tout le flot des paroles des mathématiciens qui devaient s'incliner devant autant de rigueur et de force. Il était même de bon temps de dire que ce qui était vrai dans les mathématiques, devait aussi l'être pour leur enseignement. Alors la mathématique qui embrassait à son tour, toutes les mathématiques et les mathématiciens se mirent à réver toujours plus fort et toujours plus loin. Les mathématiciens en oublièrent d'ailleurs presque qu'il fut un temps où leur existence était quasiment décorative ou utilitaire, et que ce temps pourrait revenir très vite. Ils oublièrent aussi au passage de parler au peuple de ce que pouvait bien contenir leur science de haut vol. Mais Mère Philosophie n'était plus là pour rattraper ses marmots et l'enfant qui avait grandit devait se débrouiller seul, solitude qu'il avait d'ailleurs bien choisi. Et puis les choses commencèrent à se corser lorsqu'un certain ministre osa clamer l'inutilité pure et simple des mathématiques et presque de leur enseignement. Les mathématiciens avaient beaucoup parlé entre eux et ne s'attendaient pas à si peu de considération pour leur discipline. Puis vint la grande crise, pas une crise des fondements comme ils eurent l'habitude d'en essuyer pas mal de façon interne, mais une simple crise financière, extérieure, qui les projeta sur le devant de la scène. Ils furent accusés de tous les maux et bon nombre de procès leur fut intentés. Les mathématiques et les mathématiciens furent ébahis, car ce qu'ils prenaient pour de la grandeur, s'était transformé devant leurs yeux en décadence. Et comment lutter puisqu'ils n'avaient dit mot jusque-là sauf dans quelques cercles tellement restreints que rien ne filtrait vers l'extérieur, ils ne savaient d'ailleurs pas ce qu'était un micro ni une caméra. Comment rattraper l'étendue des dégats sans porte-voix? De l'enseignement primaire à la recherche de haut niveau, les mathématiques, déconnectées de leur sens profond, devenaient illisibles et presque inutiles à la société toute entière. Deux questions légitimes apparaissent de fait: A quoi servent les mathématiques et est-il utile de les enseigner? Si d'un point de vue interne les réponses affirmatives à ces deux questions semblent couler de source, cela est bien loin de faire l'unanimité à l'extérieur.

    L'élément le plus important est que les philosophies platoniciennes, aristotéliciennes et cartésiennes qui sont encore associées aux mathématiques ne sont plus efficaces pour répondre à ce type de questions. Elle butent sur le simple fait qu'elles n'ont pas été pensées au sein de sociétés technologiquement développées (on peut résumer en disant en gros que le développement technologique d'une société est corrélé avec sa capacité de simulation et de modélisation). Ainsi avec ce types de philosophies, il est impossible de penséer les mathématiques telles qu'elles sont et telles qu'elles devraient apparaître dans l'enseignement.

    Il semble donc urgent d'activer une philosophie sous-jacente aux mathématiques sur laquelle elles peuvent s'appuyer pour produire un discours justificateur et explicatif. Un malheur n'arrive jamais seul et non seulement les mathématiques ont été détachées de leur bases philosophiques depuis près de trois siècles mais on ne peut pas dire que la philosophie liée à la complexité du monde et aux sociétés technologiquement avancées soit en grande forme. Il manque donc le lien mais aussi le terreau.

    Il serait nécessaire que les mathématiques actuelles et leur enseignement soient associés à ce que je nommerai "la philosophie de la transmission". Le terme est suffisamment explicite et englobant pour faire sens. La transmission peut d'une part s'entendre au sens collectif ou individuel ( développement durable, générations futures, pédagogie, citoyenneté ), au sens politique ( choix décisifs ), au sens technologique ( récursivité, itération, modélisation, simulation ) ou au sens spirituel ( charité, don, action envers son prochain...). La transmission s'ancre dans l'action, la pratique et l'instant. Un développement de la philosophie de la transmission, intégrant la complexité dynamique, est devenue impérative pour solidifier l'édifice et lui permettre de s'élever à partir de racines profondes. Or force est de constater la maigreur de la littérature sur ce sujet.

    Le travail doit s'effectuer dans plusieurs champs distincts, complémentaires et inséparables.

    • Il faut modifier la philosophie sous-jacente aux mathématiques
    • Il faut modifier le discours sur les mathématiques
    • Il faut modifier modifier le discours sur l'enseignement des mathématiques

     

    • Modifier la philosophie sous-jacente aux mathématiques

    Faire évoluer et converger les philosophies qui sous-tendent les mathématiques en une philosophie de la transmission, de la pratique et de la diffusion centrée sur le moment présent et dont l'acte transcendant est le partage.

    La pensée est un acte et comme tel, elle vit dans l'instant. L'idée est sa réalisation.

    La philosophie de la transmission permet de penser le présent comme qualité potentiellement transcendante. La pratique, et la ritualisation des actes (physiques ou de pensée) redeviennent porteurs de sens en tant que balises visibles et régulières d'un chemin inconnu mais au but clairement identifié .

    Mettre le paradoxe de l'intransmissibilité au centre du questionnement philosophique.

    Replacer les mathématiques comme un élément central de la philosophie de la transmission ( rationnalité, outil, génération de problèmes philosophiques majeurs, socle des sociétés technologiquement avancées, éléments du choix et de la décision... )

    Il faut placer le récepteur, le destinataire, le lecteur, au centre de l'édifice philosophique et non pas le producteur. Ne pas le transformer en consommateur mais le penser comme agent actif et récepteur responsable d'un flux dynamique. La jouissance de l'instant se fait par mesure de son intensité et de sa qualité transmissive (interne ou externe).

     

    • Modifier le discours sur les mathématiques

    Faire évoluer le vocabulaire sur la description des mathématiques

    Elles sont utiles à la compréhension du monde et la permettent (physique, finances, interpolation, statistiques, théorie des jeux, chaos, complexité, comportements dynamiques, évolutions).

    C'est un outil indispensable aux générations futures (simulation, modélisation, extrapolation).

    Elles sont le fruit d'une synthèse universelle.

    Elles permettent de produire un discours rationnel sur les régularités et sur la complexité du monde.

    Elles permettent de parcourir de façon rationnelle un chemin inconnu.

    La pratique est la base de l'activité mathématique. La pratique des mathématiques c'est les mathématiques. On s'exerce à la démonstration, comme à toute technique mathématique.

    Repenser la place de la géométrie et de la preuve. La démonstration devient porte d'entrée dans le monde des mathématiques et non objectif final visé ( il y a beaucoup d'indécidabilité).La preuve n'est pas conclusive, elle est introductive (pour la visite de l'édifice mathématique, pas pour leur enseignement), la pratique (expérimentation) est conclusive et doit être effectuée de façon rigoureuse et sérieuse. Pour préciser, le preuve peut être trouvée sur le chemin de l'expérimentation (ou non) et le cas échéant cela laisse la place à l'expérimentation ( qui peut être celle de la preuve d'ailleurs !). C'est en ce sens que je dit que la preuve est nécessairement introductive et non terminale, c'est l'expérimentation qui l'est, comme outil de découverte d'un surplus de complexité ( si elle existe).

    La simplicité (toute relative!) se montre par la preuve (et ce qui ne veut pas dire que la preuve est simple), alors que la complexité ne se laisse attraper que par l'expérimentation.

    La compréhension n'est pas conditionnelle, c'est la pratique qui l'est.

    Modifier la dynamique de la pratique des mathématiques et la considérer d'origine intérieure se prolongeant vers l'extérieur et non le contraire (de toutes façon c'est une question de foi!).

    Il ne faut pas hésiter à avoir recours à la mise en forme de la présentation des mathématiques, au prosélytisme, rendu possible par les médias et principalement celui qui est le plus adapté aux mathématiques : le monde numérique et Internet.

     

    • Modifier le discours sur l'enseignement des mathématiques

    Donner du sens pour ceux qui ne les pratiqueront plus ou presque plus dans leur vie active et faire pratiquer ceux qui devront les utiliser et les produire de façon assez intensive

    Penser l'hétérogénéité (contenue) comme réellement positive en libérant les leviers d'action positifs et en diminuant l'idée de la figure dominante de l'enseignant pour lui affecter une figure de leader de groupe et de facilitateur de la diffusion des savoirs et des techniques. S'appuyer sur l'énergie du groupe pour diffuser les connaissances et les techniques.

    L'élève ne construit pas son savoir, il construit sa pratique (elle peut être en vue d'augmenter son savoir!) et se met en contact avec les objets de savoirs et de technique en vue de leur intériorisation.

    Modifier la figure idéale-typique du prof de maths, possédant un stock énorme de savoirs « morts », en celle de l'honnête homme cultivé qui diffuse les connaissances au plus grand nombre, permet une analyse quantitative et rationnelle du monde complexe dans lequel nous vivons.

    Réhabiliter l'élève moyen comme praticien actif et positif.

    L'informatique permet d'une part de développer la pratique expérimentale ainsi que de répondre à la demande de rigueur associée à toute discipline scientifique par l'intermédiaire de la programmation.

    Mettre non pas la construction des savoirs au centre du processus de transmission mais l'apprentissage de la rationalité des pratiques. Il faut replacer l'orthodoxie des pratiques et des rituels au centre de l'apprentissage, tout en favorisant et encourager l'émergence de la créativité.

    La pratique régulière et la production interne (intention) sont indispensables à toute personne désirant structurer son esprit, se diriger vers des études scientifiques, des filières sélectives (par les mathématiques)

    La concentration dans l'instant est un élément essentiel de la profondeur des apprentissages, elle permet un accès à la durée, place la difficulté non pas comme obstacle mais comme état de temps, elle permet de pacifier le terrain psychique, elle permet de découpler le temps de la pratique orthodoxe ( en particulier celle des mathématiques) du temps vulgaire.

    Les limites des mathématiques doivent être clairement annoncées dès les petites classes afin de ne pas idéaliser (diaboliser) cette discipline au fur et à mesure de sa pratique. Pour s'en convaincre il suffit d'en parler avec des enseignants non scientifiques.

     

    Selon moi, il reste bien sûr une dernière phase au processus : infléchir l'enseignement des mathématiques, ses buts généraux, l'évaluation, sa place dans le système global mais je laisse la tâche de le faire à ceux dont mission leur est donnée et dont c'est le métier. Le mien est d'enseigner, pas de penser (sauf à mes cours...). 

     

    Transmission Control Protocol

  • Gödel : le tsunami mathématique

    Le théorème d'Incomplétude de Gödel c'est un  peu comme un ouragan qui se forme dans l'océan mathématique. Les mathématiciens sur leur île le voient se rapprocher au loin et puis ils discutent entre eux et aussi avec les habitants de l'île voisine qui ne sont pas matheux mais philosophes. Voilà en résumé un extrait de leur longue conversation leur conversation au sujet des résultats  de Gödel:

    -C'est un ouragan, il se dirige vers nous.

    -Non, c'est vers nous qu'il vient.

    -En fait c'est une simple tempête tropicale.

    -Non c'est bien un ouragan mais il ne nous atteindra pas, c'est sur votre île qu'il ira.

    -Non jamais de la vie, vous voyez bien qu'il se dirige vers votre île et gonfle au fur et à mesure qu'il avance sans dévier.

    -Pff, tout ce bruit pour une simple tempête tropicale.

    Mais au fait qu'est qu'il a dit Gödel ?

    Il a dit en gros que si les mathématiciens voulaient s'acharner à vouloir tout démontrer ils allaient s'épuiser à la tâche parce qu'en mathématiques il existe des propositions qui peuvent être vraies et indémontrables en même temps.
    Çà a jeté un certain froid dans l'univers mathématique et puis les philosophes ont trouvé ça tellement génial qu'ils ont décidé de mettre les résultats de Gödel à toutes les sauces. Les matheux se marraient parce qu'ils savaient qu'ils ne pouvaient s'appliquer que dans le cadre très restreint des mathématiques.

    En fait les travaux de Gödel ont déstabilisé violemment le monde mathématique des années 30 qui pensait pouvoir démontrer lui-même la suprématie de sa discipline. Puis avec le temps, les mathématiciens s'en sont accomodé en intégrant dans leur vision du paysage mathématique, quelques trous qui seraient les propositions indécidables, c'est à dire dont on ne pourrait jamais savoir si elles sont vraies ou fausses.

    Mais en fait en 1994, deux mathématiciens ont commencé à montrer que l'incomplétude n'était ni une tempète tropicale, ni un ouragan mais que c'était en fait un tsunami. Les mathématiciens doivent donc réajuster une fois de plus leurs lunettes pour admirer la beauté du paysage, car ce qu'ils doivent maintenant voir devant eux n'est plus un grand nombre de propriétés démontrables avec quelques trous formés par quelques propositions indécidables isolées mais un gros trou formé par ces dernières autour duquel il y aurait quelques propositions éparses assorties de leur pénible démonstration à peine visibles à l'oeil nu.

    Et là, à mon avis, ce sont les philosophes qui vont rigoler à leur tour... ah, oui tiens au fait, puisqu'on en parle, ils sont où les philosophes ?

    Pour des compléments solides sur la question voir l'excellent article de Jean-Paul Delahaye dans le numéro de janvier 2009 de " Pour la Science" : Presque tout est indécidable!

  • L'école d'Athènes et les mathématiques

    svg2raster.jpeg
    Cliquer sur l'image pour l'agrandir.

     

    L'Ecole d'Athènes est une fresque réalisée par le peintre Raphaël entre 1509 et 1510. L'oeuvre fait près de 8 mètres de large sur 2,5 mètres de hauteur.

    Cette fresque symbolique présente les figures majeures de la pensée antique. Les personnages sont représentés en des places et des postures particulières, ornés de certains attributs, ce  qui permet d'en identifier certains. Ils sont disposés sur deux lignes horizontales principales, et sont séparés par une verticale nettement discernable, ce qui confère à ce tableau ordre et symétrie parfaite.  L'Ecole d'Athène représente un haut lieu de culture philosophique, dont l'humanisme transpire d'ailleurs du tableau, qui s'oppose à la culture théologique. Le cadre architectural est classique. On ne peut s'empécher d'y voir le souvenir des termes romains. Cet environnement fait contrepoid aux univers mythologiques souvent présents dans les tableaux de Raphaël. Le regard du spectateur se dirige en premier lieu vers le centre du tableau où se tiennent debout les deux personnages principaux: Platon (14) et Aristote (15) , majestueux et habillés de la toge romaine. Platon tient le Timée, et pointe le doigt vers le haut pour montrer que la connaissance procède d'un mouvement ascendant, qui va de la terre au ciel de l'idéal philosophique, alors qu'Aristote,  dirige la paume de la main vers le sol indiquant que tout idéal philosophique ne peut exister que dans le monde d'ici-bas.

    Tous les personnages sont référencés dans l'article de wikipédia. Il semble qu'il y ait quelques doutes sur l'identité de certains d'entres eux. Nous nous arréterons dans cette note à la seule composante "mathématique" des figurants de cette fresque

    Une lecture dynamique de cette fresque est possible ICI . On y voit en particulier les éléments de perspective, d'éclairage et la présence du nombre d'or ( rectangles et carrés ) au centre de la scène. Une étude des éléments de perspective du tableau est disponible ICI.

     

    La première question qui vient à l'esprit est Y a-t-il des maths dans le Timée que tient Platon à la main? ( que j'espère tout le monde a lu !).

    La réponse vient sans se faire attendre puisque s'il n'y a pas de mathématiques pures dans le Timée ( le problème du doublement de la surface d'un carré se trouve par exemple dans le Ménon ), il y a bien la présence des quatre solides réguliers de l'espace sur cinq,  dit d'ailleurs de Platon. Les mathématiciens de l'époque connaissaient leur existence. Ces joyaux géométriques sont formés à partir des trois polygones réguliers suivants: le triangle équilatéral, le carré et le pentagone régulier donnant naissance en les rapprochant dans l'espace autour d'un sommet aux cinq polyèdres suivants: le tétraèdre (chaque sommet voit trois triangles équilatéraux) , l'octaèdre (chaque sommet voit quatre triangles équilatéraux), l'icosaèdre (chaque sommet voit cinq triangles équilatéraux), le cube (chaque sommet voit trois carrés), et le dodécaèdre (c'est celui qui manque et chaque sommet voit trois pentagones réguliers). En fait une fois l'existence de ces merveilleux objets établie, montrer qu'il n'en existe pas d'autres est très simple puisqu'il suffit de constater que si l'on place  six triangles équilatéraux dans un plan autour d'un sommet commun on occupe la totalité des 360° disponibles et on ne peut pas les replier dans l'espace. Il en est de même avec un sommet qui verrait quatre carrés de 90°, ce qui remplit aussi l'espace. Quatre pentagones ayant un sommet commun se recouvrent déjà dans le plan, impossible donc de les replier dans l'espace pour former un volume!

    Le recherche d'harmonie est sous-jacente à la construction de cet univers tridimensionnel parfait et si le triangle équilatéral et le carré sont à son origine, c'est parce que ces deux figures peuvent être formée à partir des éléments "atomiques" de la géométrie que sont les triangles rectangles. Un triangle équilatéral peut se concevoir en juxtaposant  deux triangles rectangles dont les deux cotés adjacents à l'angle droit mesurent la moitié l'un de l'autre, mais c'est une construction encore plus harmnieuse que choisira de présenter Platon dans le Timée qui utilise non pas deux mais six triangles rectangles. Il est aussi possible de former un carré à partir de deux triangles rectangles isocèles. Il devient ainsi plus aisé de comprendre pourquoi le dodécaèdre formé à partir de pentagones réguliers ( qui ne peuvent se construirent à partir de triangles rectangles ) a été découvert plus tardivement. On notera sans doute la forte influence pythagoricienne dans ces raisonnements.

     

    tri03.gif



    Tout ceci est remarquablement illustré, expliqué et apparait sous forme animée sur le site IcosaWeb dans une page intitulée "Les corps platoniciens "

    Mais l'objectif de Platon était en fait de mettre ces quatre volumes parfaits en relation avec le monde d'en bas ( Platon associera l'éther au dodécaèdre plus tardivement), et si vous avez parcouru la page précédente, vous n'avez pas pu manquer le fait que ces quatres corps de base ont été associés à deux éléments dont l'existence est garantie par le toucher et la vue: la terre et le feu et deux éléments "nécessaires" pour garantir deux moyens proportionnels: eau et l'air. L'idée est encore atomiste, les quatre éléments sont les briques insécables à partir desquelles peut se construire (penser) le Monde de façon harmonieuse. André Ross explique cela très bien dans l'article suivant intitulé "Mathématiques et civilisation" ainsi que dans Platon et les mathématiques".

    carré.jpgSi l'on considère que la figure de référence du plan est le carré dont chaque coté peut être partagé dans un rapport a et b.  Trois "nombres-surface" suffisent pour recomposer le carré : aa, ab et bb.

    cube.jpgAlors que si l'on découpe un cube dans les mêmes proportions, il faut quatre "nombres-volume" et donc quatre éléments ( or l'univers est bien tridimentionnel!) : aaa, abb, aab, bbb et le fait qu'ils soient en proportion géométrique garantira l'harmonie de la construction!

     

    On a donc bien présent dans le Timée la première équation mathématique modélisant le monde. Les mathématiques aparaissent comme le langage intermédiaire permettant de faire le lien entre le monde d'en bas imparfait et périssable et le Ciel des Idées parfait et intemporel :

    png.latex.png

     

    Dans ce livre, en pointant son doigt vers le ciel, c'est ce message que Platon envoie au monde terrestre et qui, je le pense, reste encore bien présent de nos jours.

     

    La seconde question qui peut-être intéressante est de savoir quels sont, dans ce tableau, les personnages ayant un rapport privilégié avec les mathématiques?

    On trouve peut-être en 1, Zénon d'Elée qui est à l'origine  des premiers paradoxes de type "mathématique". On se rappellera d'Achille qui ne peut pas rejoindre la tortue et de la flèche qui n'atteint jamais son but. - (Diaporama)

    En 6, il s'agit de Pythagore (VIème siècle avant J.C.) dont le nom est très connu mais dont le personnage possède encore beaucoup de mystères, historiques d'une part et sur qui qu'il était vraiment.

    En 9, Hypatie première femme mathématicienne connue au destin tragique, apparaît peut-être sous les traits de Francesco Maria Ier della Rovere.

    En 18 Euclide ou Archimède pourraient être représentés sous les traits de Bramante, maître et protecteur de Raphaël.

    Les principaux représentants antiques des mathématiques ( sauf Thalès ) semblent donc présents, certes sous d'autres traits, mais c'est aussi le cas pour Platon qui a prit les traits de Léonard de Vinci pour l'occasion.

    En ce qui concerne Pythagore, on pourra consulter les liens suivants afin de mieux connaître cet homme prédicateur, qui fonda une communauté religieuse et politique composée exclusivement d'hommes vétus de blancs fuyant les femmes en couche, qui évitent de rentrer dans la maison d'un mort, refusent de croquer une fève ou de manger un oeuf, qui doivent respecter la règle du silence et une discipline stricte tout en exaltant le courage et l'honneur du combat. En fait la communauté est partagée entre deux attitudes correspondant à celles des deux leaders. Il y a d'un coté les adeptes de Pythagore, le mage ascète, replié sur lui, retiré de la cité, inquiet de toutes les formes d'impuretés qui pourrait faire obstacle au salut de l'âme et de l'autre, les pythagoriciens "politiques" qui suivent Milon de Crotone son gendre, mangent de la viande, acceptent le monde de la cité avec l'intention d'agir sur lui pour le transformer .

    Pythagore fut le premier à envisager le nombre sous une perspective religieuse et mystique, libérant au passage les mathématiques de leur seule visée utilitaire à laquelle ils étaient cantonnés jusque là et c'est cette forme de pensée qui a résisté au temps. (Universalis ).

    Pour compléter sur Pythagore:

    Les diaporamas d'André Ross

    Pythagore, la géométrie des nombres

    Pythagore, des triplets au théorème

    Pythagore, moyennes et proportions

    Pythagore par l'Encyclopédie de l'Agora

    Pour un rappel de la contribution de Pythagore dans l'histoire des mathématiques : La brève histoire des mathématiques

    A noter : J.-F. Mattei : Pythagore et les pythagoriciens (Que sais-je n° 2732)

    On pourra aussi lire le passage pittoresque suivant sur les purgations physiques et spirituelles d'André Dacier, philologue né en 1651 dans La vie de Pythagore, ses symboles; La vie de Hiéroclès et ses vers dorés:

     

    Texte non disponible

  • Vers une philosophie de la transmission

    Le pendule de Foucault

    La période actuelle que traversent l'enseignement et la transmission des savoirs pourrait correspondre à celle du début des mathématiques où  les hommes ayant trouvé mille et une règles attendent sans le savoir, un Euclide qui leur permettra de passer à la démonstration générale et d'accéder ainsi à l'universalité de son propos.

    La rationalisation et la massification des procédés d'enseignement n'est pas très ancienne ( vers le XVIème) et le modèle du collège semble avoir été le premier, et pour l'instant le seul, vecteur de transmission de savoirs de façon organisée. Or aujourd'hui Internet, nous apporte l'ombre d'une crise profonde aussi présente dans le monde éducatif que dans le monde économique pour nous montrer que le type d'enseignement que nous promulguons depuis quelques siècles n'est certainement qu'un exemple d'un édifice plus général de transmission des savoirs et des codes de comportement. Si l'éducation familiale s'est heurtée à l'impossible transmission des connaissances, il n'en est plus de même avec la présence d'un cyber-espace, où l'internaute autonome peut très bien se passer théoriquement des murs de la classe pour construire son savoir. La cellule familiale pourrait tout autant s'approprier ces savoirs et devenir une source possible à grande échelle de leur transmission tout aussi efficace qu'un système productiviste cadencé à vitesse unique. L'état conserverait le droit d'édition des programmes officiels associés aux différents concours et diplômes qu'il distribue. Alors que reste-t-il de l'édifice répondant à la demande utopique de transmission de savoirs et de codes?  Une ruine? Le modèle du collège, qui était initialement prévu pour transmettre les valeurs religieuses et celles de la noblesse, et s'est adapté coûte que coûte, à la massification depuis le début de sa création,  semble à bout de souffle tant ses objectifs initiaux paraissent lointains et beaucoup moins lisibles aujourd'hui. A l'heure, des technologies numériques qui peinent à  trouver leur place dans ce monde qui n'était pas prévu pour elles, toute tentative de modification du système  semble être impossible ou ne répondre qu'à la seule demande implicite de massification. Mais si les critiques peuvent être nombreuses, les solutions de remplacement ne se bousculent pas. Elles me semblent en fait associées à une nécessaire "Philosophie de la transmisssion" qui  elle aussi  peine à émerger du néant.

    Alors que justement,  je recherchais sur la toile des éléments de réflexion sur les paradoxes de la transmission et sur l'existence d'une philosophie sur ce sujet, je suis tombé sur les écrits de Jean Agnès publiés dans la revue Le Portique. Je vous engage à les lire car ils pointent sur ce qui reste d'habitude caché, tu, par les partisans de telle ou telle chapelle et permettent une mise en lumière des paradoxes liés à la difficile, presque impossible, transmission.

    L’intransmissibilité est-elle une question philosophique ?

    L’internaute et le pédagogue

    L’espace de la pédagogie au temps d'Internet

    Les autres textes de Jean Agnès

     

    Les canards