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  • Qui est le meilleur joueur de tennis de tous les temps?

    Voilà une bonne question et si on la pose à M. Google voilà ce qu'il nous répond ou plutôt ce que les principaux utilisateurs de forums nous répondent.

    Bon allez, en fonction de la tête du joueur, de l'âge de celui qui répond et ses connaissances tennistiques on voit apparaître les noms de Nadal, de Federer, de Börg, de Mac Enroe, Wilander, Edberg  et cela seulement en consultant le premier lien précédent.

    J'ai toujours révé de me faire interroger sur la question par un vrai journaliste sportif. Ah, tiens je le vois arriver.

    Le journaliste sportif
    - Bonjour, vous êtes Webmaster des Inclassables Mathématiques et passionné de tennis.

    Moi
    - C'est ça oui.

    Moi (dans ma tête)
    - J'adore qu'on m'appelle Webmaster avec un W majuscule.

    Le journaliste sportif
    - Alors pour vous quel est le meilleur joueur de tennis de tous les temps?

    Moi
    - Personnellement, je dirai Jimmy Connors à cause de ça:

     

     

    Le journaliste sportif
    - Je vois qu'en fait vous êtes très attaché à Connors car c'est un excellent showman mais objectivement, rationnellement, rien ne vous permet de dire que Jimmy Connors est le meilleur joueur de tous les temps.

    Moi (dans ma tête)
    - Le journaliste ne doit sans doute pas savoir que je suis prof de maths et que je peux apporter des arguments mathématiques et rationnels.

    Moi
    - Il faudrait en fait que je vous explique comment faire une analyse du réseau complexe de l'histoire du tennis professionnel depuis 1968 mais je ne sais pas si vous vous sentez d'attaque (de coup droit bien sûr).

    Rires (en plus je fais rire le journaliste sportif, je suis aux anges...)

    Moi
    -Alors allons-y.

    Nous allons tout d'abord définir les conditions de l'analyse. Nous prendrons en compte les résultats de tous les matchs joués par les joueurs de tennis professionnels entre 1968 et 2010.  Tous les matchs du Grand Chelem et ceux intervenant dans le classement ATP seront pris en compte, soit au total 3700 joueurs, 3640 tournois et 133 261 matches.

    Si le nombre de tournois est assez régulier avec cependant des pics en 1980 et 1992 avec plus de 90 tournois par an, le nombre de joueurs ne cesse de décroître linéairement depuis 1996 et est passé de 400 environ à 300, comme l'indique le graphique suivant:

     

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    Le graphique suivant indique la proportion de de joueurs ayant remporté ou perdu un nombre donné de matches. On voit que beaucoup de joueurs gagnent ou perdent peu de matches (en fait ils quittent les tournois rapidement. A l'autre bout, un petit groupe de joueurs (les meilleurs)  jouent beaucoup de matches qu'ils gagnent généralement contre les plus faibles et aussi entre eux qu'ils gagnent ou qu'ils perdent, connu sous le nom d'effet Matthew (les pauvres deviennent plus pauvres et les riches plus riches).

     

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    Nous allons ensuite construire le graphe des rencontres. Il sera orienté (une flèche sera "tracée" à chaque victoire du joueur j vers le joueur i) et pondérée par le nombre de défaites du joueur j contre le joueur i.  

    Le graphique suivant est un sous-graphe extrait de celui de tous les joueurs concernant ceux qui ont été premier au classement ATP. L'intensité et la largeur d'une flêche sont proportionnelles au logarithme de son importance (poids).

     

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    La représentation de ce résau peut être utilisée pour classer les joueurs en calculant pour chacun leur taux de "Prestige" dont la somme serait égale à 1. Celà n'est pas sans rappeler la méthode de calcul du PageRank pour classer les pages Web.

    Le prestige d'un joueur i représente la fraction de prestige totale de l'état d'équilibre du graphe dans un processus de diffusion. Pour expliquer en termes un peu plus simples, chaque nouveau résultat d'un matche modifie le "prestige" des deux compétiteurs puis par diffusion celui de tous les joueurs. Les mathématiques nous indiques que ce calcul converge vers un équilibre permettant de calculer le nouveau "Prestige" de tous les joueurs du graphes. Par exemple un joueur k qui  a gagné contre le joueur i qui vient lui même de remporter un matche contre un adversaire fort voit son prestige augmenter.

    Comme dans le cas du PageRank, il est nécessaire de fixer la valeur d'un paramètre (c pour le PageRank, q ici). La valeur a été choisie dans les deux cas.

    Le graphique suivant indique le prestige en fonction du nombre de victoires (jusqu'à 7) pour différentes valeurs du paramètre q. Le choix de 0.15 est "traditionnel" et équilibré.

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    Plus le nombre de matchs gagné est grand plus le prestige est grand. Cependant, le nombre de match gagnés augmentant, le niveau de prestige doit être recalculé en implémentant une condition dite de normalisation, imposant qu'une quantité donnée soit constante. Elle permettra ainsi de définir un Prestige de référence a partir duquel tous les autres pourront être caculés. Cette condition impose que la somme des produits du nombre de victoires par le prestige pour chaque joueur soit égal à 1.

    Et le résultat est bien celui que je vous avais donné. Jimmy Connors est bien le meilleur joueur de tous les temps:

     

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    Le journaliste sportif
    - C'est certainement aussi celui qui a gagné le plus grand nombre de matches, c'est à dire dont la carrière a été la plus longue. Et les joueurs dont la carrière est terminée sont favorisés par rapport aux autres qui sont en cours de carrière. Alors pour ce qui est de la rationnalité de votre méthode de calcul permettez moi d'en douter.


    Moi (un peu embarassé par les arguments du journaliste)
    - Burp, c'est à dire que en fait... Vous voyez, il ne faut pas confondre le nombre de victoires et le prestige. Rafael Nadal par exemple serait classé 40 ème au nombre de victoires alors qu'il est à la 24 ème position dans notre classement. C'est aussi visible pour Björn Borg qui a eu une carrière plus courte que la moyenne et est cependant classé dans le top 10 de notre classement.
    Pour ce qui est de la carrière en cours d'un certain nombre de joueurs, vous avez remarqué qu'il y a un biais. On peut penser à un classement annuel qui diffère parfois du classement ATP et IDF.

     

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    Il est possible aussi de penser à un classement par type de surface qui donnerait Jimmy Connors gagnant pour l'herbe et Andre Agassi pour les surfaces dures. Si l'on considère le meilleur joueur des tournois en terre battue c'est Guillermo Villas.

    En faisant le calcul par décennie, Jimmy Connors est le meilleur pour les années 70, Ivan Lendl pour les années 80, Pete Sampras pour les années 90 et Roger Federer pour les anées 2000.

    Le classement par "Prestige" est donc une nouvelle forme de classement qui ne coïncide d'ailleurs pas toujours avec les classements techniques et qui permet en outre de faire des comparaisons sur des temps longs.

    Le journaliste sportif
    -
    Merci, je crois que j'ai tout compris, enfin la partie non technique. Vos inclassables mathématiques ont prouvé leur incroyable  efficacité et ont eu raison de mes inclassables joueurs de tennis.

    Moi
    -Si vous voulez de plus amples informations sur la partie technique de ces classements, je vous renvoie à l'article original de Filippo Radicchi publié sur ArXiv. Voilà c'est fini.

     

     

  • La cycloïde, la chaînette et le cercle font leur film (de savon)

    Il est assez de rare de trouver un traitement très "pédagogique" d'un sujet au sens noble du terme, c'est à dire permettant de l'éclairer sous des angles très différents, dont  un très original et concret, tout en construisant son unité profonde.

    Prenons ensemble l'optique, la dynamique, la statique, la géométrie, l'élasticité, le calcul différentiel et l'histoire des mathématiques. Prenons aussi trois courbes très connues, la cycloïde, la chaînette et le cercle. Il semble difficile de relier le tout en un ensemble cohérent et pourtant il suffit d'un peu de savon pour les regrouper!

    Je vais tenter d'expliquer. En cas de dérapage et pour plus de détails, l'article original est ICI et il suffit de s'y référer.

    L'histoire commence par la recherche de la brachistochrone, c'est à dire de la courbe de descente la plus rapide pour un point pesant. En 1697, Jacques  Bernouilli pose ce problème. Newton, Leibniz, Jacques et son frère Jean Bernouilli s'y collèrent et proposèrent leur solution. Les deux frères (qui se haïssaient) y parvinrent et découvrirent que le profil cherché était une portion de cycloïde.

     

     

     

     

    Un peu plus tard, ce problème peut être résolu grâce au calcul différentiel en recherchant le minimum d'une expression du type fonctionnelle qui a été étudiée par Euler et Lagrange.

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    Prenons un peu de recul: 

     

    En fait l'idée c'est de penser à une bulle de savon. Il faut aussi avoir l'idée de planter deux piquets verticaux entre deux profils: l'un horizontal z=0 et l'autre z=1/y. En plaçant un film de savon entre les piquets et les deux surfaces on devrait voir cela:  
     

    2011-01-28_2057.png 

     

      2011-01-28_2106.jpg

     

    La trace laissée sur la surface horizontale est une cycloïde. Pour faire un peu plus scientifique on peut dire que la courbe qui minimise la surface de la bulle de savon ( oui la bulle de savon est fainéante, elle suivra toujours ce que l'on appelle une surface minimale) est la même que celle celle qui minimise le temps de parcours d'un point pesant.

    Pourquoi me direz-vous? Tout simplement parce que le problème mathématique associé aux deux problèmes est similaire et donc la solution est de même nature.
    Et pourquoi le problème mathématique est de même nature? Tout simplement parce que le profil z=1/√y a été bien choisi.

    L'élasticité, est maintenant mariée à l'histoire des maths, au calcul des variations et à la dynamique.

    On pourrait aussi s'imaginer qu'un rayon lumineux circule du point P1 au point P2 dans un milieu dont l'indice de réfraction serait proportionnel à 1/√y. La courbe suivie par le rayon lumineux serait identique à la courbe précédente: une cycloïde. Et voilà donc l'optique qui se mèle à la partie.

    Supposons maintenant qu'une chaine soit tendue entre deux points dans un lieu où le potentiel de gravitation  (très particulier, certes) serait proportionel à 1/√y . La courbe formée par le fil serait une cycloïde. La statique s'invite.

    L'intérêt de ce dernier point est de retrouver le profil de  la chaînette avec un film de savon en choisissant un profil de type z=ky. C'est la courbe qui  minimise son énergie lorsqu'elle est soumise à la pesanteur.

     

    2011-01-28_2132.jpg

    Pour trouver le cercle, il suffit  de changer le profil supérieur et le choisir tel que z=1/y. En reprenant les analogies précédentes, les trois courbes: la cycloïde, la chainette et le cercle se retrouvent ensemble dans le même "bain" (à bulles).

    2011-01-28_2147.jpg

    Voilà, c'est terminé et pour compléter quelques adresses suivent:

     

    Autour de la cycloïde "Maths en Jean"

    Complètement cycloïdique "Blog Sciences"

    Courbe brachistochrone "Mathcurve"

    Brachistochron Problem "Wolfram"

    Courbe Brachistochrone "Wikipédia"

    Solving the brachistochron and other variational problems with soap films "ArXiv"

    Soap films help to solve mathematical problems

     

  • Alice au pays des merveilles, 38 ans après

    Il s'agit bien sûr de 38 ans après la parution du livre. en 1865. L'extrait de film est donc de 1903. La musique "Jill in the Box" a été composée par Wendy Hiscocks. Le film durait 12 minutes, 8 ont pu être sauvées et restaurées par BFI. Il a été le plus long film produit en Angleterre à cette époque.

     

     

     

  • Un nouveau record pour les décimales de Pi

    171020697.jpegAprès celui de Fabrice Bellard en janvier 2010, ce nouveau record de 5000 milliards de décimales a été atteint en août dernier, par un ingénieur système japonais, Shigeru Kondo .

    L'article de Reuters.

  • LES MATHÉMATIQUES EN FRANCE ET DANS LES SCIENCES

    RAPPORT sur LES MATHÉMATIQUES EN FRANCE ET DANS LES SCIENCES
    en présence des lauréats de la médaille Fields,
    MM. Ngô Bảo Châu et Cédric Villani,
    ainsi que du lauréat du prix Gauss, M. Yves Meyer
    Compte rendu de la réunion du 17 novembre 2010

    Par M. Claude Birraux, Député

    EXTRAIT

     

    M. Sylvestre Huet, journaliste à Libération.

    Nous restons un peu sur notre faim. Vous avez d’emblée évoqué les points forts sur lesquels s’est fondée la fameuse excellence de l’école française. Or l’organisation du système de recherche français a subi de grands bouleversements. Selon vous, cela aura-t-il des conséquences positives ou négatives, ou bien une combinaison des deux selon les différents aspects ? Peut-être faudrait-il parler d’autre chose que des médaillés Fields et des quelques autres récompensés, dont les cas sont certes singuliers mais qui sont limités sur le plan des effectifs. En d’autres termes, le nouveau système entraînera-t-il un maintien, un accroissement ou une diminution de la force de frappe des sciences utilisant des mathématiques ? Prenons un peu de recul historique : la France produit ni plus ni moins de docteurs ès sciences qu’en 1993, c’est-à-dire depuis longtemps, dans un contexte où certains pays moyens ou émergents sont dans une dynamique. Cette stagnation, qui frappe les mathématiciens mais aussi les physiciens, les chimistes, les biologistes et les spécialistes des sciences de la terre utilisant les mathématiques, peut-elle continuer ? Pouvons-nous rester dans cette ère, alors que tout le monde nous dit que le futur sera piloté par les sciences et techniques ? Cela me semble la question la plus cruciale ; je ne suis pas convaincu que l’enjeu, aujourd’hui, pour le système de recherche français, réside aux extrémités, école primaire d’un côté, Normale Sup’ de l’autre.


    M. Cédric Villani.

    Votre question est très difficile car elle fait appel à de la prédiction, exercice toujours délicat. Si j’ai bien compris, vous vous interrogez sur l’impact possible des réformes actuelles sur l’enseignement supérieur. Les bouleversements étant en cours, nous ne disposons pas du recul nécessaire pour savoir comme la situation évoluera. La loi instaurant l’autonomie des universités, notamment, a fait couler beaucoup d’encre. Je suis très favorable à l’autonomie mais beaucoup de gens ne pensent pas comme moi. En tout cas, tout le monde se reconnaît, je crois, dans le mouvement actuel de revalorisation de l’université en tant que lieu de travail et de production de science. Cela plaît particulièrement aux mathématiciens, pour lesquels une carrière normale, passionnante, consiste à travailler au contact des étudiants, à l’université ; celle-ci, pour nous, joue un rôle central.
    Ensuite, une divergence est sensible entre partisans de la centralisation et de l’autonomie. Personnellement, je pense que la gestion matérielle des universités ne peut se faire à distance, de manière abstraite, qu’elles ont absolument besoin d’un pilotage de terrain. La dimension politique locale est également primordiale. Quant aux effets à long terme, il est difficile de les prévoir.
    S’agissant des pays émergents, l’université chinoise de Fudan, que j’ai visitée il y a peu, possède un campus effrayant : les standards de qualité de vie sont équivalents à ceux de Stanford. Des sommes considérables sont manifestement investies année après année. Le niveau des élèves n’est évidemment pas le même qu’à Stanford mais l’attractivité est réelle. Peut-être la question des moyens est-elle vitale, les solutions sont souvent simples.

    M. Claude Birraux.

    La perception de la science et des scientifiques, en Chine, n’est sans doute pas tout à fait la même qu’en France. Certains, chez nous, considèrent que la science est malpropre et que, par conséquent, il ne vaut mieux pas en faire.


    M. Cédric Villani.

    Les sciences ne bénéficient en effet pas du même respect en Europe et en Asie. Et cela se répercute sur les dirigeants politiques : il est très fréquent, en Chine, que des anciens scientifiques occupent des postes très élevés ; c’est incontestablement beaucoup plus rare dans notre système.


    M. Yves Meyer.

    Pour répondre très clairement, j’ai toujours été animé par la passion de transmettre et j’ai commencé à enseigner dans le secondaire, avant de poursuivre, pendant quinze ans, en première année de premier cycle universitaire. Mes élèves n’étaient donc ni des médaillés Fields ni des écoliers. La tradition mathématique française, Cédric l’a dit, a consisté à transmettre le feu sacré. Mais cela suppose une réponse. Si aucun public ne vient assister à un concert, à qui en incombe la faute ? Même si le programme est merveilleux, il faut que la société soit au rendez-vous.

    La désaffection relative vis-à-vis des sciences traduit aussi la désaffection vis-à-vis de l’effort, mot pratiquement banni de l’enseignement secondaire actuel. Quand j’enseignais en lycée, de 1960 à 1963, je donnais un problème par semaine ; avec cent élèves et dix pages par copie, cela faisait mille pages à corriger et annoter chaque semaine, j’y consacrais mon samedi et mon dimanche. Aujourd’hui, quiconque ferait de même serait traité de bourreau. Les enseignants ne donnent qu’un problème par trimestre, parce que la notion d’effort a disparu.