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  • L'hypothèse de Riemann

    Le Graal des mathématiciens

    Une hypothèse d’apparence anecdotique avancée par Bernhard Riemann il y a cent cinquante ans au sujet d’un problème classique, la répartition des nombres premiers, focalise l’intérêt des plus grands mathématiciens. David Hilbert en avait fait le huitième problème de sa célèbre liste. Au moins une dizaine de médailles Fields l’ont étudié… En 2005, il manque toujours le maillon qui permettra une démonstration plausible.

    L'article du HS n° 20 de " La Recherche" - 2005 : ICI

    « Jusqu’à ce jour, les mathématiciens ont en vain tenté de découvrir un ordre dans la suite des nombres premiers, et nous avons des raisons de croire que c’est un mystère que l’esprit ne pénétrera jamais. »

    Leonhard Euler

  • Descartes et l'intellection

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    Quel que soit le maître, il vient un moment où l’élève est tout seul en face du problème mathématique; s’il ne détermine son esprit à saisir les relations, s’il ne produit de lui-même les conjectures et les schèmes qui s’appliquent tout comme une grille à la figure considérée et qui en dévoileront les structures principales, s’il ne provoque enfin une illumi­nation décisive, les mots restent des signes morts, tout est appris par cœur. Ainsi puis-je sentir, si je m’examine, que l’intellection n’est pas le résultat mécanique d’un procédé de pédagogie, mais qu’elle a pour origine ma seule volonté d’attention, ma seule contention, mon seul refus de la distraction ou de la précipitation et, finalement, mon esprit tout entier, à l’exclusion radicale de tous les acteurs exté­rieurs. Et telle est bien l’intuition première de Descartes: il a compris, mieux que personne, que la moindre démarche de la pensée engage toute la pensée, une pensée autonome qui se pose, en chacun de ses actes, dans son indépendance plénière et absolue.

     

    (…) Pourtant l’enfant qui applique sa liberté à faire une addition selon les règles n’enrichit pas l’univers d’une vérité nouvelle; il ne fait que recommencer une opération que mille autres ont faite avant lui et qu’il ne pourra jamais mener plus loin qu’eux. C’est donc un paradoxe assez frappant que l’attitude du mathéma­ticien; et son esprit est semblable à un homme qui, engagé dans un sentier fort étroit où chacun de ses pas et la position même de son corps seraient rigoureusement conditionnés par la nature du sol et les nécessités de la marche, serait pourtant pénétré par l’inébranlable conviction d’accomplir librement tous ces actes. En un mot, si nous partons de l’intellection mathématique, comment concilierons-nous la fixité et la nécessité des essences avec la liberté du juge­ment.


    La suite de cette note sur le blog Jadislherbe : ICI, extrait de  Introduction à des textes choisis de Descartes (1946) par Jean-Paul Sartre.


    Bibliographie de Descartes : ICI

    Articles de Pierre Guenancia : ICI

  • Conversation autour de l'intuition en mathématiques

    26a92d3c467768b5ef6694fa3befad72.jpgDans le Petit Robert, on peut trouver la définition suivante du mot intuition : « Forme de connaissance immédiate qui ne recourt pas au raisonnement. » L’intuition occupe-t-elle une place en mathématiques, discipline de rigueur par excellence, où toute affirmation s’accompagne d’une démonstration ?

    Témoignages sur le phénomène de l’intuition

    Bien qu’il soit discutable de parler de réelle connaissance à ce stade, l’histoire regorge de témoignages de mathématiciens racontant des expériences durant lesquelles un résultat ou une solution à un problème se sont imposés spontanément à l’esprit, sans raisonnement préalable.

    Finalement, il y a deux jours, j’ai réussi… Comme en un éclair subit, l’énigme se trouva résolue. [Gauss]

    Au moment où je mettais le pied sur le marchepied, l’idée me vint, sans que rien dans mes pensées antérieures parût m’y avoir préparé. [Poincaré]

    Ayant été réveillé très brusquement par un bruit extérieur, une solution longuement cherchée m’apparut immédiatement, sans le moindre instant de réflexion de ma part. [Hadamard]

    Voilà comment commence la note " L'intuition en mathématiques" sur le blog de Bao Long Principia - Histoire et Philosophie des mathématiques.

    La suite de la note est ICI

    Une fois la lecture de la note terminée j'ai envoyé un commentaire et je vous livre la conversation qui a suivi.

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    Olivier

    Ne parlant que pour moi, j'ai distingué deux types d'intuitions de natures très différentes, toutes aussi spontanées: l'une que j'appellerai de "direction" celle qui ouvre un chemin nouveau, une voie inexplorée et l'autre que je nommerai de "synthèse", c'est celle qui en un instant rapproche des éléments auparavant épars ou oubliés. Ces deux intuitions permettent une modification complète des chemins du raisonnement et donnent lieu à cette sorte d'explosion "illuminative". Ces deux types d'intuition peuvent travailler de concert et se mélanger au raisonnement. Des allez et retour peuvent se produire. L'intuition n'est pas de même nature que le raisonnement, elle n'est ni avant, ni après,ni moins sûre, elle est à tout simplement à coté du raisonnement.


    Bao Long

    Votre distinction de ces deux formes d'intuition est assez naturelle. Poincaré a ajouté encore d'autres distinctions, il parle (en d'autres mots) de :

    L'intuition empirique (exemple : "par un point, on ne peut mener qu'une parallèle à une droite").

    L'imagination (exemple : Poncelet "imaginait" que des propriétés vraies pour des hyperboles aux asymptotes réelles, restent vraies pour l'ellipse aux asymptotes imaginaires... c'est contraire aux sens, donc à l'intuition précédente).

    L'intuition d'induction (ce qui est vrai pour des cas restreints, reste vrai pour des cas généraux; c'est différent de l'exemple précédent car les ellipses ne généralisent pas les hyperboles). Cette intuition justifie les preuves par induction.

    L'intuition du nombre pur (avec l'exemple "deux quantités égales à une troisième, sont égales entre elles").

    Finalement, tout cela forme un riche mélange prêt à servir chez tout mathématicien.

    Olivier

    Merci de me répondre aussi vite et aussi clairement. Si je me suis permis de vous envoyer un commentaire c'est que l'idée de "synthèse" ne me paraissait pas bien transparaître mais peut-être n'ai je pas été assez précis et n'ai je pas assez approfondi votre note. J'associe au mot "synthèse" l'idée de mettre ensemble, de lier des choses, ce  que l'esprit ne fait pas naturellement. L'intuition provient dans ce cas, du simple fait de permettre à un évènement intellectuel de se produire, de laisser une place pour qu'il survienne. Je dirai dans ce cas que l'intuition n'est pas un "acte" mais un espace mis à disposition de la synthèse afin qu'elle se réalise. C'est peut-être naïf mais il ne me semble pas avoir vu cela dans l'approche des mathématiciens que vous avez cité: L'intuition comme "permission", entièrement passive, un espace ou un temps permettant une "fusion", un rapprochement décisif, un contact.
    Il serait intéressant de demander à Alain Connes ce qu'il y a après le trou... Son remplissage ou un mur troué a travers lequel on voit la lumière?

    Bao Long

    Pourtant, il me semble que l'intuition dont il est question dans l'article est compatible avec l'intuition de synthèse que vous citez. En effet, quand vous la décrivez comme un espace permettant "une fusion, un rapprochement décisif, un contact", cela me semble bien correspondre au fait que l'inconscient cherche en réalisant des combinaisons d'idées. Parfois, une combinaison remarquable, c.-à-d. (pour reprendre vos mots) une fusion, un rapprochement ou un contact remarquable entre idées se réalise et il se produit alors une illumination.

    D'ailleurs, une synthèse se fait plus facilement lorsqu'on a plus de recul, ce qui est le cas de l'inconscient par rapport au conscient. (Bien sûr, tout ceci est informel : je suis loin d'être psychologue.)

    La fécondité d'une intuition varie selon les problèmes et au sein de chaque problème. Certaines ouvrent une piste nouvelle (intuition de direction), d'autres apportent un éclairage sur un savoir existant (intuition de synthèse). Il en existe probablement d'autres, je pense par hasard à une intuition que j'appellerais "de résolution" : celle que l'on a lorsqu'on réalise LA manipulation à faire dans un problème pour en débloquer la solution en un instant (et le reste du travail n'est que formalité).


    Pour Alain Connes, je serais tout aussi curieux que vous de lui poser la question.

    Olivier

    Nous sommes en effet d'accord. C'est peut-être cette idée d'inconscient qui me gênais, une sorte de "ça se passe malgré moi" alors que j'y vois plutôt au contraire, une entreprise consciente mais impossible à déclencher consciemment, comme de laisser la porte ouverte pour que "ça" se produise. Un peu comme le serait celle d'une maison qu'on laisserait ouverte et l'on attendrait un animal farouche dont la venue ne dépendrait pas de nous, mais c'est bien nous qui avons entrouvert cette porte. Cette idée ne me parait pas tellement compatible avec l'idée que je me fais de l'inconscient, sorte de machine qui travaille quand le conscient ne travaille pas. Je n'ai jamais été  très copain avec l'inconscient, il faut dire...

    Bao Long

    Si l'inconscient fonctionnait "malgré soi", cela me gênerait aussi. Il semble cependant que le conscient joue un rôle fondamental dans l'affaire, en particulier lors de l'étape nécessaire au démarrage de l'inconscient : l'étape de préparation où le conscient étudie et sèche sur le problème. Je ne l'ai peut-être pas assez souligné (contrairement aux auteurs de mes sources) : un travail conscient est nécessaire pour maximiser la taille des "données" disponibles sur le problème. Après seulement, l'inconscient peut travailler à son tour sur ces données avec un peu plus de recul que le conscient.

    Ainsi, c'est bien le travail conscient qui met l'inconscient dans de bonnes prédispositions, qui "ouvre la porte pour laisser venir l'animal farouche". On n'est pas sûr que l'animal viendra, mais plus la porte est ouverte, plus on a de chances qu'il arrive...

    Illustration serge Secconi

  • Alphonse Allais

    Le café est un breuvage qui fait dormir, quand on n’en prend pas.

  • John Von Neumann

    Si les gens ne croient pas que les mathématiques sont simples, c’est uniquement parce qu’ils ne réalisent pas à quel point la vie est compliquée.