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Livres et lettres - Page 28

  • Mathématiques et littérature

    Si vous voulez connaître la sextine et les permutations qui lui sont associées, comme l'inventa Arnault Daniel au 13ème siècle et peut être en réaliser une en suivant son modèle :

    Lo ferra voler qu 'el cor m'intra
    no 'm pot ges becs escoissendre ni ongla
    de lauzengier qui pert per mal dir s'arma ;
    e pus no l'aus batr'ab ram ni verja,
    sivals a frau, lai on non aurai oncle,
    jauzirai joi, en vergier o dins cambra.

    Quan mi sove de la cambra
    on a mon dan sai que nulhs om non intra
    — ans me son tug plus que fraire ni oncle —
    non ai membre no 'm fremisca, neis l'ongla,
    ainsi cum, fai l'enfas devant la verja :
    tal paor ai no 'l sia prop de l'arma.

    Del cor Li fos, non de l'arma,
    e cossentis m'a celât dins sa cambra,
    que plus mi nafra 'l cor que colp de verja
    qu 'ar lo sieus sers lai ont ilh es non intra :
    de lieis serai aisi cum carn e ongla
    k non crairai castic d'amie m d'oncle.

    Ane la seror de mon oncle
    non amei plus ni tan, per aquest 'arma,
    qu'aitan vezis cum es lo detz de l'ongla,
    s'a lieis plagues, volgr'esser de sa cambra :
    de me pot far l'arnors qu 'ins el cor m'intra
    miels a son vol c 'om fortz de frevol verja.

    Pus floric la seca verja
    ni de n'Adarn foron nebot e oncle
    tan fin'amors cum selha qu'el cor m'intra
    non cug fos une en cors no neis en arma :
    on qu 'eu estei, fors en plan o dins cambra,
    mos cors no 's part de lieis tan cum ten l'ongla.

    Aissi s'ernpren e s'enongla
    mos cors en lieis cum l'escors'en la verja,
    qu 'ilh m'es de joi tors e palais e cambra ;
    e non am tan paren, fraire ni oncle,
    qu 'en Paradis n'aura doble joi m'arma,
    si ja nulhs hom per ben amar lai intra.

    Arnaut tramet son chantar d'ongl'e
    d'oncle a Grant Desiei, qui de sa verj'a l'arma,
    son cledisat qu'après dins cambra intra.

    Mais peut-être préférez vous le carré Gréco-latin ou les pseudo-quenines.

    Si vous avez aussi quelque intérêt pour l'Oulipo et leurs membres célébres, mais que vous ne détestez pas les mathématiques....

    Rendez-vous
    ICI ( ou ICI ) pour la lecture de l'article (PDF): "Mathématiques et littérature" de Michèle Audin sous-titré à très juste titre et non sans humour " Un article avec des mathématiques et de la littérature".

     

  • Alexandre Vialatte

    59de93fc0b629aa5070f1003e6ab402c.jpg« La statistique est une science étonnante. Elle donne des certitudes chiffrées. Elle a prouvé que dans huit cas sur dix les boulangers sont des hommes qui fabriquent du pain.»
       
    Chronique des grands micmacs (1960-1970)

    Citation touvée sur le "Vaste blog": ICI

    Une autre citation d'Alexandre Vialatte:

    " La science explique le monde, elle répond aux questions. Elle veut savoir. La littérature veut s'étonner. Elle est à base d'éblouissement. Elle ne répond pas, elle questionne. Elle prend plaisir à ne pas comprendre, comme un enfant devant le prestidigitateur. Elle est en état de fascination. Le poète aime mieux être ébloui que renseigné. Ce qui la passionne, ce n'est pas le pourquoi, c'est le comment. Comment les choses se passent. Car on n'y comprend rien. On s'y trouve tellement habitué qu'elles paraissent toutes naturelles. Mais arrêtez-les une seconde. Ou regardez-les passer en restant immobile, et vous n'y comprendrez plus rien. Un instant d'attention et tout devient un mystère.(…) C'est la tâche de la littérature de rendre ce mystère des choses. Elle a pour rôle de faire le portrait de l'indicible."

  • Oncle Petros et la conjecture de Goldbach

    0a9e8c45dbb7bca22559169bfa7576a2.jpgPetros Papachristos est considéré comme la honte de sa propre famille. Mais plus on répète à son jeune neveu que son oncle Petros a raté sa vie, plus le neveu s'intéresse à lui, cherchant à comprendre pourquoi cet homme est ainsi renié par ses frères. Ancien mathématicien célèbre, Petros vit dans une petite maison, cultive son jardin et joue aux échecs, et il n'a visiblement jamais réussi à s'imposer dans le monde scientifique. La cause de cet échec ? Petros a délaissé ses recherches et sa carrière pour focaliser toute son attention sur un seul et unique problème : démontrer la conjecture de Goldbach, hypothèse émise en 1742 et qu'aucun mathématicien n'a jamais pu élucider. Petros s'est fixé un but inaccessible, qui est devenu une véritable obsession..., jusqu'à renoncer et se retirer du monde.

    À son tour, et contre l'avis de son oncle, le neveu va tenter de percer cette énigme, et ce faisant, il va aussi reconstituer le parcours de Petros. D'hypothèses en intrigues, c'est non seulement toute la caste des mathématiciens qui se révèle alors (on croise, entre autres figures, Hardy, Turing ou Gödel), mais en outre les aléas, impératifs, espoirs et déceptions de ces scientifiques au fil de leur quête.

    Apostolos Doxiadis parvient ici à construire un formidable roman autour des mathématiques, ouvert à tout lecteur, où les théorèmes scientifiques sont des métaphores poétiques, et les questionnements posés de véritables enquêtes policières.

    J'ai tout simplement dévoré ce petit livre en un clin d'oeil... Il peut être lu facilement par tout public. Il y a, ici ou là, quelques termes techniques de niveaux Terminale et  supérieur mais le charme du livre n'est pas rompu s'ils ne sont pas maîtrisés.

    A mettre entre toutes les mains.

    Ce livre devrait être reconnu d'Utilité Publique pour assimiler la délicate notion de CONJECTURE, en mathématiques...

  • Mathématiques, méditation et écriture.

    Mais qu’il s’agisse de méditation ou de mathématique, je ne songerais pas à faire mine de "travailler" quand il n’y a pas désir, quand il n’y a pas cette faim. C’est pourquoi il ne m’est pas arrivé de méditer ne serait-ce que quelques heures, ou de faire des maths ne serait-ce que quelques heures, sans y avoir appris quelque chose ; et le plus souvent (pour ne pas dire toujours) quelque chose d’imprévu et imprévisible. Cela n’a rien à voir avec des facultés que j’aurais et que d’autres n’auraient pas, mais vient seulement de ce que je ne fais pas mine de travailler sans en avoir vraiment envie. (C’est la force de cette "envie" qui à elle seule crée aussi cette exigence dont j’ai parlé ailleurs, qui fait que dans le travail on ne se contente pas d’un à-peu-près, mais n’est satisfait qu’après être allé jusqu’au bout d’une compréhension, si humble soit-elle.) Là où il s’agit de découvrir, un travail sans désir est non-sens et simagrée, tout autant que de faire l’amour sans désir. A dire vrai, je n’ai pas connu la tentation de gaspiller mon énergie à faire semblant de faire une chose que je n’ai nulle envie de faire, alors qu’il y a tant de choses passionnantes à faire, ne serait-ce que dormir (et rêver. . . ) quand c’est le moment de dormir.

    C’est dans cette même nuit, je crois, que j’ai compris que désir de connaître et puissance de connaître et de découvrir sont une seule et même chose. Pour peu que nous lui fassions confiance et le suivions, c’est le désir qui nous mène jusqu’au coeur des choses que nous désirons connaître. Et c’est lui aussi qui nous fait trouver, sans même avoir à la chercher, la méthode la plus efficace pour connaître ces choses, et qui convient le mieux à notre personne. Pour les mathématiques, il semble bien que l’écriture de tout temps a été un moyen indispensable, quelle que soit la personne qui "fait des maths" : faire des mathématiques, c’est avant tout écrire. Il en va de même sans doute dans tout travail de découverte où l’intellect prend la plus grande part. Mais sûrement ce n’est pas le cas nécessairement de la "méditation", par quoi j’entends le travail de découverte de soi. Dans mon cas pourtant et jusqu’à présent, l’écriture a été un moyen efficace et indispensable dans la méditation. Comme dans le travail mathématique, elle est le support matériel qui fixe le rythme de la réflexion, et sert de repère et de ralliement pour une attention qui autrement a tendance chez moi à s’éparpiller aux quatre vents. Aussi, l’écriture nous donne une trace tangible du travail qui vient de se faire) auquel nous pouvons à tout moment nous reporter. Dans une méditation de longue haleine, il est utile souvent de pouvoir se reporter aussi aux traces écrites qui témoignent de tel moment de la méditation dans les jours précédents, voire même des années avant.

    La pensée, et sa formulation méticuleuse, jouent donc un rôle important dans la méditation telle que je l’ai pratiquée jusqu’à présent. Elle ne se limite pas pour autant à un travail de la seule pensée. Celle-ci à elle seule est impuissante à appréhender la vie. Elle est efficace surtout pour détecter les contradictions, souvent énormes jusqu’au grotesque, dans notre vision de nous-mêmes et de nos relations à autrui ; mais souvent, elle ne suffit pas pour appréhender le sens de ces contradictions. Pour celui qui est animé du désir de connaître, la pensée est un instrument souvent utile et efficace, voire indispensable, aussi longtemps qu’on reste conscient de ses limites, bien évidentes dans la méditation (et plus cachées dans le travail mathématique). Il est important que la pensée sache s’effacer et disparaître sur la pointe des pieds aux moments sensibles où autre chose apparaît - sous la forme peut-être d’une émotion subite et profonde, alors que la main peut-être continue à courir surle papier pour lui donner au même moment une expression maladroite et balbutiante.



    Extrait de  " Récoltes et semailles " 9.4 Désir et méditation

    Alexandre Grothendieck

  • Autour des "mathématiques naturelles"

    a671be3d91d712d3123866fe1ae52eb4.jpg "Les mathématiques naturelles" de Marc Chemillier - Odile Jacob

    Ce que nous, occidentaux, appelons " Mathématiques ", sont en fait des mathématiques analytiques. Elles nécessitent l'usage de symboles et ne sont pratiquées que dans des sociétés munies d'écriture, elles sont abstraites.  Mais il y a aussi les mathématiques analogiques qui sont pratiquées par tout individu, qui interviennent en premier lieu dans ses relations spatiales avec le monde extérieur. Elles ne sont pas toujours élémentaires et correspondent parfois à des intuitions complexes que peuvent avoir les mathématiciens eux-mêmes.

    C'est principalement cette deuxième forme de mathématiques qui fait l'objet des recherches et du livre de Marc Chemillier, qui nous fait découvrir, tour à tour, la présence de mathématiques sous une forme non exprimée:

    dans les figures tracées sur le sable en une seule ligne par les habitants du Vanuatu,
    dans un  jeu de stratégie comme l'awélé,
    dans certaines formes de musiques,
    et dans les arts de la divination.

    L'aspect du livre qui m'a paru le plus intéressant est sans aucun doute, la recherche de la présence des mathématiques rationnelles au sein de leur pratique naturelle.

    Comment savoir si les dessinateurs de lignes continues dans le sable du Vanuatu, les joueurs de harpe Centrafricains ou les devins malgaches ont des formes de raisonnement qui avoisinent ceux des mathématiques formelles?
    Quelles expériences l'ethnomathématicien peut-il mettre en oeuvre pour accéder à cette information ?
    Quelle est la nature des mathématiques analytiques sous-jacentes à leur pratique naturelle ?

    Il ne faut pas s'y méprendre, il y a des maths dans le livre ! Les concepts mathématiques  peuvent être assez techniques, ils sont abordés au même titre que les travaux de l'ethnologue.

    C'est ce qui fait de ce livre une oeuvre passionnante en permettant de découvrir ce que j'appellerai "des mathématiques incarnées"


    A consommer sans modération.


    Les liens associés :

    Entretien avec Marc Chemilier "Sciences et Avenir" : ICI

    L'article de Libération : Belles Maths innées : ICI

    La logique de la longue ligne Vanuatu de Marc Chemillier : ICI

    L'algorithmique ethnique de Ron Eglash ( PDF ) : ICI

    Une ancienne version du chapitre 3 du livre : Jeux de société ( PDF ): ICI

    Aspects mathématiques et cognitifs de la modélisation des structures musicales de Marc Chemillier ( PDF ): ICI

    Aspects mathématiques et cognitifs de la divination sikidi à Madagascar de Marc Chemillier ( PDF ): ICI

    Mathématiques de tradition orale de Marc Chemillier ( PDF ): ICI

    De nombreux liens d'ethnomathématiques sur cette page d'Histoire des mathématiques de CultureMath : ICI

    Une de mes précédentes notes sur les ethnomathématiques : ICI