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Sigaud de Lafond à l'affiche

sigauddelafond.JPGLa médiathèque de Bourges exposera du 10 février au 2 avril la magnifique collection d'instruments du XVIIIème siècle provenant du cabinet de physique et de chimie expérimentale de Sigaud de Lafond. Ces instruments uniques, certains décorés à la feuille d'or, sont actuellement conservés au lycée Alain-Fournier à Bourges.

Enseignant à Paris puis à Bourges, sa ville natale, Sigaud de Lafond conçoit du matériel pédagogique et rédige des ouvrages pour en expliquer la fabrication et l'utilisation. Il fut aussi célèbre en son temps que son illustre professeur, l'abbé Nollet. Il s'intéressa tout particulièrement à l'étude de l'électricité et aida Macquer à synthétiser de l'eau, quelques années avant Lavoisier.


Les visiteurs pourront découvrir ces instruments double_cone.JPGau rez-de-chaussée de la médiathèque. Des ateliers seront spécialement conçus pour les scolaires, d'autres pour le jeune public ainsi que pour tous les publics. L'association Valentin Haüy aidera à réaliser un parcours pour déficients visuels. Chacun pourra ainsi mieux comprendre les principes physiques mis en œuvre grâce à des répliques pouvant être manipulées et à des vidéos d'expériences.

Une notice biographique rédigée à partir des archives, une présentation des instruments, une notice sur la physique au temps des Lumières sont actuellement disponibles sur le site:

www.sigauddelafond.fr

 

Sigaud de Lafond, physicien berruyer oublié... ou presque !

 

Sigaud de Lafond, enfant de Bourges, physicien éclairé

 

Sigaud de Lafond est né rue Porte Jaune à Bourges, le 5 janvier 1730. Il est élève des Jésuites au collège Sainte-Marie, actuellement dévolu à l'Ecole des Beaux-Arts.


En 1749, il est à Paris, à l'époque des expériences théâtrales d'électrostatisme réalisées dans les salons parisiens. Les cours de physique et de chimie sont dispensés à un public érudit.  L'abbé Nollet et son élève Sigaud de Lafond y exercent leur talent d'expérimentateurs fort habiles. Sigaud se consacre également à l'enseignement tout d'abord au collège Louis-le-Grand puis dans le cabinet qu'il a construit. Seul puis avec l'aide de son neveu Rouland, il apporte quelques améliorations aux machines qui produisent de l'électricité par frottement. Il publie également ses travaux et ses cours dans plusieurs ouvrages comme ses Leçons de physique expérimentale (1767) ou encore son Traité de l'électricité (1771).

En 1776, Macquer et Sigaud synthétisent de l'eau à partir de dihydrogène, de dioxygène et d'une étincelle. Cette expérience capitale dans l'évolution des sciences prouve que, contrairement à la théorie d'Aristote toujours d'actualité au XVIIIème siècle, l'eau n'est pas un élément premier. Sept ans après, Lavoisier améliore considérablement cette expérience et devient ainsi le « père de la chimie moderne ».


A la Saint-Jean 1779, Sigaud revient à Bourges en tant que professeur de physique expérimentale. Les Jésuites ayant été chassés en 1762, le collège de Bourges ne compte plus beaucoup d'élèves.  La ville de Bourges l'accueille comme un sauveur : une maison attenante au collège est reconstruite, des instruments sont achetés chez Rouland  pour une somme fort conséquente de près de dix mille livres, à mettre en parallèle avec le prix de location de la maison qui est de  deux cents livres par an.

Sigaud continue d'écrire et de publier à Paris: en 1781, les quatre volumes de son Dictionnaire de physique ; de 1782 à 1787,  il publie des réflexions dans trois ouvrages comme l'Economie de la Providence dans l'établissement de la religion où il s'en prend violemment à ces contemporains qui, tels J-J Rousseau, dénigrent les religions.

En 1786, la situation financière du collège est toujours désastreuse. Les Pères Doctrinaires en prennent alors la direction jusqu'en 1792. Sigaud traverse tous ces changements et ces temps si troublés, non sans frayeurs et manque d'argent. A partir de 1786, il occupe la chaire de physique expérimentale ; il donne trois leçons publiques hebdomadaires. Lakanal[1] fait également partie de l'équipe enseignante. En 1792, par décision du comité d'Instruction Publique présidé par Lakanal, le Collège Royal devient Ecole Centrale. Professeur admiré et pédagogue respecté, Sigaud enseigne la physique et la chimie expérimentale.

En 1802, dans son dernier ouvrage, l'Electricité médicale, sont publiées les conclusions de ses expériences qu'il a menées principalement sur des personnes paralysées ou présentant des troubles psychologiques. En effet, comme bon nombre de physiciens et de médecins, il s'interroge sur les effets de l'électricité sur la santé.

Cette même année, grâce à l'appui de Fourcroy[2], Bonaparte nomme Sigaud de Lafond alors âgé de 72 ans, premier proviseur du lycée de Bourges. Fatigué par cette charge de travail, il démissionne de son poste à l'âge de 77 ans. Son successeur, Monsieur Raynal, lui rend un hommage fort appuyé : « un savant [qui] se faisait admirer, [un] homme de bien [qui] se faisait chérir »

Le 24 janvier 1810, Sigaud décède à l'âge de 80 ans.

 

 

Sigaud de Lafond, une référence

Malgré plusieurs demandes, Sigaud n'a pas été admis à l'Académie Royale des Sciences de Paris mais en était l'un des membres associés. En revanche, il appartenait à plusieurs académies dont celle de Montpellier, de Valladolid et de Saint-Petersbourg. Ses ouvrages ont été traduits dans plusieurs langues ainsi des Leçons de physique expérimentale en norvégien ou encore des Elements de physique théorique et expérimentale en espagnol.

Dans les cercles parisiens, sa renommée était telle que son portrait était à vendre en 1777. Il fut même choisi comme personnage dans une pièce de théâtre, « La physique à la portée de tout le monde », écrite par Aimé-Henri Paulian en 1791.

Sigaud avait bien entendu été très influencé par son maître, l'abbé Nollet. Cependant, ce-dernier propose souvent de la « physique-spectacle », l'expérience de la ronde des soldats commotionnés à Versailles en est un exemple.  Sigaud, quant à lui, fait appel aux mathématiques et publie des planches de figures géométriques.

Dans le domaine de la physique, ces travaux étaient reconnus aussi bien par les plus grands savants de l'époque comme Ampère[3] que par certains de ses collègues qui s'appuyaient sur ses ouvrages pour construire leurs cours.

Sa contribution à l'utilisation de l'électricité en médecine ne fut pas non plus négligeable ; Laënnec reprit ses travaux dans son Traité de l'auscultation médiate et des maladies des poumons et du cœur édité en 1828.



La collection d'objets scientifiques

De ces instruments, il n'en subsiste qu'une quinzaine, conservés au lycée Alain-Fournier Ils sont de grande qualité, certains finement décorés à la feuille d'or, d'autres sculptés en laiton.

Tous ces instruments étaient utilisés lors des cours et on peut imaginer que les élèves étaient invités à les manipuler. En effet, dès la moitié du XVIIIème siècle, les pédagogues s'interrogent sur la manière d'intéresser les élèves. Ils encouragent les enseignants à commencer leurs leçons par des exemples de la vie quotidienne, à rendre leurs cours plus vivants, (on ne disait pas encore interactifs), à faire participer leurs élèves, à leur montrer des expériences. C'est pourquoi à partir de 1792, les collections des  riches émigrés ont-elles été inventoriées puis distribuées aux écoles centrales et écoles supérieures.


- Le double-cône qui semble remonter un plan incliné

Lorsqu'on lâche le double-cône en haut des tablettes, il reste immobile. Lorsqu'on le dépose en bas, il remonte. Ce comportement est à l'opposé de ce qu'on aurait pu espérer puisqu'un objet lâché tombe. Comment ce phénomène est-il alors possible ? Il suffit simplement de vérifier à l'aide d'une règle que « le centre de gravité de ce corps descend constamment entre ses tablettes, quoique la totalité du corps monte effectivement de toute la hauteur du plan incliné » (Description et usage d'un cabinet de physique expérimentale, t.I, p.219 et planche XII).

Cette expérience est d'autant plus remarquable qu'elle est visuelle, déconcertante au premier abord et surtout simple à mettre en œuvre. C'est l'exemple typique d'une expérience introductive à la mécanique. On peut facilement imaginer comment le professeur peut l'exploiter : en effet, les élèves observent, s'interrogent, émettent des hypothèses pour expliquer le phénomène ; l'enseignant leur fournit des outils (définitions, principes) ; les élèves sont alors aptes à valider ou infirmer leurs hypothèses et ainsi interpréter le phénomène et conclure. Cette démarche dite d'investigation est plus que jamais d'actualité dans l'enseignement des sciences expérimentales.

 

 

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- Le pyromètre à cadran

Une tige métallique se dilate sous l'effet d'une augmentation de température. Cet appareil sert à en mesurer l'allongement. Les mesures sont lues sur le cadran dont les aiguilles sont entraînées par un système d'engrenages solidaire de la tige chauffée.

Outre sa précision, ce pyromètre est remarquable par son caractère pédagogique : en effet, le large cadran est visible par un grand nombre d'élèves et le système d'engrenages est volontairement visible pour pouvoir en expliquer le principe



[1] Joseph Lakanal (1762-1845)

[2] Antoine-François Fourcroy (1755 - 1809), élève de Sigaud, chimiste et administrateur.

[3] André-Marie Ampère (1775-1836) www.ampere.cnrs.fr/

 

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