Spirale de mots fluïenne
Le mouvement d’ensemble va du désordre à la lisibilité : les mots deviennent la trace concrète du flux qui s’apaise.
Lorsque la spirale se redresse et que la rotule se ferme, le système retrouve une cohérence durable — non par substitution, mais par intégration graduelle du déséquilibre initial.
La Rotule est l’espace génératif de vérité
La vérité ne se découvre pas (réalisme naïf).
La vérité ne se construit pas arbitrairement (idéalisme).
La vérité s’engendre dans une Rotule et se valide par sa Cérité (puissance de traversée multi-échelles).
Même lorsque je bois un simple café, le système Poussée-Rotule-Flux constitue Kernésis est en action.
Les Rotules sont le « lieu » exclusif, incarné, d’émergence des vérités traversantes multi-échelles.
La Joie est recueillie comme symptôme d’une régulation réussie.
Adopter Kernésis, c’est pouvoir transformer un lieu, un objet, une idée, un moment, une relation en interrogation ouverte : une question qui a le temps et l’espace de se former, de bourgeonner, de trouver sa propre réponse, sa vérité, dans la cohérence d’un alignement.
La Rotule permet à cette dynamique de s’essayer et de se construire.
Les p’tits papiers, une spirale et une droite
Tu n’aimes peut-être pas le café. Libre à toi de changer boisson — ou même de support pour laisser émerger Kernésis.
Prenons des p’tits papiers. Parce qu’ils sont légers, parce qu’on peut écrire dessus. Mais tu peux choisir d’autres supports : galets, plaquettes de bois, fragments d’ardoise… peu importe, pourvu que tu puisses y inscrire quelque chose.
Note sur chaque papier tout ce que tu souhaites aligner dans une situation donnée : lieux, durées, sensations, idées, personnes, intentions, questions… N’oublie rien. Nomme tout, même ce qui te semble secondaire. Tu pourras évacuer par la suite ce qui se révèle inutile ou redondant. Tu pourras en rajouter par la suite.
Dispose ensuite ces papiers sur une spirale. Parcours-la lentement. Observe ce qui bloque, ce qui résiste, ce qui demande un travail. Modifie l’ordre si nécessaire, ajoute, affine, approfondis.
Pourquoi une spirale ? Parce que le changement n’est jamais linéaire. On tourne autour du problème, on revient, on affine. La spirale permet ça : explorer sans forcer. Mais c’est plus une image pertinente qu’un nécessité géométrique … De la spirale prenons l’idée.
Tente de passer de la spirale à la droite lorsque tu juges que l’alignement est optimal. La droite, c’est le flux régulé. Ce n’est plus le chaos exploratoire — c’est le mouvement clair.
Souviens-toi : l’alignement kernésique n’est jamais réalisé aux dépens d’un autre. Il inclut le monde tel qu’il est. Ce que tu fais naître dans ton espace de vérité résonnera à l’extérieur, mais cet impact doit, lui aussi, être inclus dans la cohérence de l’ensemble.
Ainsi, chaque petit papier devient un fragment de monde, et l’alignement, un miroir de ton système ouvert.
Que tu veuilles écrire une thèse, te mettre en couple, acheter un appartement, réussir ton année scolaire ou ta compétition, parler à un ou une amie, supporter un deuil ou une souffrance, la méthode est la même. Simple. Efficace et sans appel.
Kernésis appliqué à mes pouces
Est-ce que ça marche sur moi ? Et surtout comment ça marche… Alors j’ai voulu savoir. J’ai pris un truc qui m’énerve depuis plus de quarante ans. Je me mords les peaux autour des pouces et des index. J’ai l’impression que cela arrive quand je suis fatigué, quand j’ai bu beaucoup de café, peut-être de l’alcool. Ça semble m’arriver plutôt le soir et en voiture.
J’ai commencé à écrire des mots sur les p’tits papiers. J’ai naturellement commencé à écrire des mots négatifs, ceux qui étaient le plus proches du comportement indésirable. Force est de constater que je disposais de très peu de mots pour imaginer un changement. J’ai trouvé dans un premier temps « calme », « respiration », « geste de compensation ».
Les premiers mots que j’ai notés : « voiture », « café », « fatigue », « automatique », « ennui », « alcool », « compensation », « manque de confiance », « anxiété ».
Je comprends déjà que construire la spirale demande d’avoir étudié la situation, au moins partiellement, et sans doute de la subir encore pour l’analyser vraiment.
Construire une spirale du changement demande donc déjà la conscientisation de la situation et de sa dynamique de changement ou d’évolution.
Même si je trouve que j’ai déjà beaucoup de petits papiers, j’ai fait une recherche web, qui n’a malheureusement pas été concluante pour moi : vernis amer, gants, balle anti-stress, chewing-gum, thérapie ! Je n’ai rien noté de plus.
Alors je vais reprendre mon approche kernésique sans apport extérieur. Si elle ne fonctionne pas pour mes peaux, il y a peu de chances qu’elle soit utile pour d’autres situations, ni même des organisations.
Je vais donc attendre la prochaine impulsion pour classer mes p’tits papiers car à vrai dire, malgré le fait que la situation dure depuis aussi longtemps, je n’ai aucune idée de ce qui est poussée, frein ou catalyseur.
Pour transporter mes petits papiers, j’ai utilisé un porte-monnaie plat. Vu de l’extérieur, ça semble d’une naïveté confondante. Pourtant, il faut bien que je les porte sur moi car si je recommence à me ronger les ongles, je dois retrouver un papier correspondant. Je ne me souviendrai peut-être pas de ce que j’ai écrit en pleine « crise ».
Lors de la première vraie crise, les mots qui conviennent : « ennui », « réflexion intense » (je le rajoute), « automatisme ». Je vais y adjoindre « respiration » car j’ai l’impression qu’une profonde respiration est associée à l’arrêt instantané de la tentation.
Je place ces quatre mots dans la pochette avant du porte-monnaie, séparés des autres mots. J’emporte le porte-monnaie avec moi — travail, soirées, trajets en voiture, loisirs — pendant une semaine environ.
J’ai marché aujourd’hui en bord de Loire. Mon index a tenté de gratter la peau de mon pouce à plusieurs reprises. Certainement par « ennui ». Avec « automatisme », il semble être un très bon candidat, même si ce n’était pas la raison cette fois-ci. Je peux évacuer « alcool » avec une quasi-certitude ou considérer que l’alignement est réalisé avec ce mot.
J’espère parvenir à la cicatrisation complète de mes plaies cutanées avec cette stratégie. Cela sera pour moi un marqueur fort de la pertinence de Kernésis. Créer un espace, un lieu ouvert — un jeu, au double sens mécanique et ludique — où le changement et la vérité peuvent commencer à prendre forme.
J’ai mis pour la première fois de la crème sur mes pouces. J’ai un peu rechuté à cause de la fatigue et un peu l’ennui sous la forme d’impatience.
Mais quelque chose a changé. Avant, je subissais. Maintenant, j’observe. Je nomme. Je régule.
Est-ce que mes pouces vont cicatriser complètement ? Je ne sais pas encore. Mais la Rotule est ouverte. Le LOME — Langage Ouvert (et Opérant) Multi-Échelles — se forme. Le flux commence à circuler autrement.
C’est déjà ça.
J’ai remarqué que durant la phase de crise, j’ai plus naturellement pensé au « contrôle », mot qu’il faut d’ailleurs que je rajoute, plutôt qu’à ceux que j’avais notés précédemment et que j’ai complètement oubliés, c’est-à-dire « respiration » et « calme ». Je m’aperçois à quel point changer c’est se forcer à ne pas oublier, à rendre disponible.
Pour l’instant le début de ma spirale est constitué de trois mots : « ennui », « fatigue » et « contrôle ». J’ai visiblement identifié les principales sources génératives et tenté un changement, mais je trouve que cette idée du « contrôle » s’appuie sur une base énergivore, énergie qui n’est pas forcément disponible compte tenu du fait que souvent la manie semble causée par la « fatigue ». Il faut donc que je redresse vers un alignement multi-échelles, en substituant ce « contrôle » par une autre stratégie à mettre en place : « respiration » ? Autre chose simple à mettre en œuvre en situation de crise ? Je dois transformer la spirale active en droite stabilisée.
En fait je n’éprouve plus vraiment le besoin, cette sorte de pulsion irrépressible de mettre mes doigts à la bouche. Les p’tits papiers ont comme dissous la pulsion primaire. Cela donne l’impression d’une dissolution-évaporation.
Je crois que j’ai réussi à me séparer définitivement de cette manie qui n’avait que trop duré. La « respiration » en situation de crise m’a permis de la juguler, mais pour cela j’ai du faire le travail spiralaire d’analyse et de réorganisation. J’ai dû découvrir les causes d’émergence en cours de tentative de changement. J’ai compris qu’il ne pouvait s’effectuer que dans le temps long et nécessitait une « mise à l’abri », c’est ce que j’ai nommé la Rotule, ce vide créatif dans lequel quelque chose de nouveau peut émerger, s’étendre, se développer, sans risque.
J’ai perdu le porte-monnaie. Et je ne me mange plus les peaux!