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  • Les coulisses de la création de Karol BEFFA et Cédric VILLANI Editions PRIVAT (2015)

     

    Ce livre se présente sous forme de dialogue entre les  auteurs, tous deux normaliens agrégés.
    L'agrégation de musique pour BEFFA, celle de mathématique pour VILLANI.
    Ils commencent par rappeler l'existence d'un "père fondateur commun"  pour la musique et la mathématique: PYTHAGORE !
    En effet, l'idée suivant laquelle la gamme musicale est un problème de mathématique (rapports de fréquences) remonte bien à lui.
    Puis vient le surprenante révélation d'un matheux à carrière fulgurante couronnée par la médaille FIELDS à 37 ans.

    "Presque toute ma vie, je me suis laissé emporter par le courant des événements et des opportunités.
    J'ai un peu l'impression que les événements décident pour moi. "


    Les auteurs s'expliquent ensuite sur leur "rapport à l'inconnu" :
    - les longues semaines d'errance
    - le frisson de la coïncidence qui se présente à soi
    - le sentiment d'être seul et pourtant accompagné de tant d'amis
    - les fautes et les rebonds
    - les échanges enfiévrés
    - les sautes de moral
    - les coups de chance
    - le chaos à la fois inquiétant et joyeux qui fait le quotidien
    - le trouble voire la terreur quand on se lance dans un nouveau problème
    - ce sentiment d'inconnu que l'on finit cependant par accepter
    -...
    Bref, la grande aventure, pour la thèse, la composition musicale, ...
    Et la bonne souffrance que l'on ressent quand on travaille avec motivation et que l'on se sent progresser.
    "No pain, no gain" clament-ils. C'est clair !

    BEFFA et VILLANI ont gardé un bon souvenir de leur passage à l'ENS, un "écosystème" lieu de mimétisme et d'entraide.

    "Nous passons notre temps à nous citer les uns les autres, à construire les uns sur les autres"

    Les auteurs avouent tous deux être boulimiques:
    VILLANI relate, entre autres, comment il a enchaîné trois colloques dans la journée, avec chaque fois un exposé personnel:
    "humains et robots dans l'usine"  en matinée, "rapports avec les médias" dans l'après-midi, "discours sur la grandeur de la France" (oui !) en soirée.
    Il est aussi militant de la cause européenne.Peut-on l'imaginer futur président de l'UE, élu au suffrage universel ?
    Les auteurs précisent leurs rites pour tenir le coup:
    vitamine C et magnésium pour BEFFA, tasses de thé successives des nuits entières pour VILLANI, souvent sur fond musical.
    Cependant, ils mettent en garde contre les conséquences pathologiques des excès, en citant des exemples éloquents:
    la folie finale de  GROTHENDIECK, le complexe de persécution de GöDEL, le détachement total des conventions sociales de PERELMAN, le bureau bordélique d' EINSTEIN, ...
    Mais VILLANI ajoute:
    " Les imprévisibles apportent de la couleur à la société" !

    Pour ce qui concerne l'influence de la technique sur la créativité, VILLANI précise qu'il démontre ses théorèmes "à l'ancienne"
    alors que BEFFA utilise à fond des logiciels pour ses compositions musicales.

    Ils soulignent aussi la différence de sensibilité entre hommes et femmes, surtout la différence de vitesse de maturation:
    "Les garçons restent longtemps de grands enfants qui aiment le jeu et la compétition."
    Merci à VILLANI de rappeler le nom de la première femme médaillée FIELDS, l'américano-iranienne Myriam MIRZAKHANI (2014)
    et à BEFFA celui de la première femme compositeure entrée à l'Académie des Beaux Arts, la française Edith CANAT de CHIZY (2005)

    En conclusion, quelques conseils donnés par VILLANI:
    - faire confiance au hasard (!)
    - ne jamais s'enfermer dans des cases
    - suivre la pulsion d'avancer, sans cesse élargir son horizon
    - transmettre son énergie, son ardeur mais aussi ses doutes et ses questionnements
    - laisser tomber tout sujet pour lequel on n'éprouve pas un intérêt vital
    - ...
    BEFFA conclut par une pirouette:
    "The proof of the pudding is in the eating"
    ( en bon français: il faut juger sur pièces)


    J'allais oublier l'appréciation peu complaisante, rapportée par BEFFA, du centralien Boris VIAN :
    "Un type qui déclare ne rien comprendre aux maths est un fieffé imbécile; un point c'est tout"
    Et VILLANI de répondre :
     "Incisif mais il a bien raison" !
    Qu'on se le dise ...

     


    KOSMANEK  Edith Edwige
    Universitaire retraitée
    http://kosmosya.xooit.fr/t224-Publications-scientifiques-d-Edith-KOSMANEK.htm

  • Lectures d'été ou de ce qu'il en reste

    Je vous conseille :

    CVT_Lordre-du-temps_2134.jpgL'ordre du temps de Carlo Rovelli - Flammarion

    Dans ses Sept brèves leçons de physique, Carlo Rovelli confiait qu’une question avait guidé sa vie de chercheur : la nature du temps. Se hissant sur les épaules d’Isaac Newton, d’Albert Einstein, de Stephen Hawking et de bien d’autres, il nous livre enfin ses découvertes dans ce livre majeur. 
    Le temps est au cœur d’un étrange mystère. Tel un flocon de neige qui fond lorsqu’on s’en saisit, il s’est progressivement délité sous les assauts de la science : on sait dorénavant que le temps s’écoule plus lentement en plaine qu’en altitude ; qu’à l’échelle des étoiles et des planètes, il varie d’un point à l’autre, tandis qu’il ne « passe » pas au niveau microscopique.
    Que reste-t-il de tangible dans ces décombres ? Et comment construire une théorie du temps qui colle à notre perception, mais aussi à l’analyse des philosophes et aux fulgurances des poètes ? Voilà le défi brillamment relevé par Carlo Rovelli au fil des pages. Émerge alors un paysage d’une beauté inouïe où, pour la première fois, le temps retrouvé surgit de façon naturelle…

    Du même auteur, un autre livre passionnant: Anaximandre de Millet ou la naissance de la pensée scientifique

     

     1153816588.jpgLe spectre d'Atacama, Alain Connes, Danye Chereau et Jacques Dixmier _ Odile Jacob

    Ce roman nous invite à partager la quête de la vérité dans la peau d’un scientifique, d’une physicienne rescapée d’un séjour quantique et d’un as de l’informatique. Chemin faisant, le lien entre espace et musique se révèle, avec Messiaen et son Quatuor pour la fin du Temps, avec les spectres mystérieux captés par l’observatoire d’Alma au Chili.

    À l’aléa du quantique vont se mêler celui, rebelle, des nombres premiers et celui des topos du grand mathématicien Alexandre Grothendieck, dont on écoutera les motifs. Le diable aussi jouera son rôle. Il sévit dans le machine learning qui l’emporte au jeu sans que l’on puisse comprendre pourquoi.

    Qui gagnera la partie ?

    Alain Connes est mathématicien, professeur au Collège de France, titulaire de la chaire d’Analyse et Géométrie, membre de l’Académie des sciences et de plusieurs académies étrangères, dont la National Academy of Sciences des États-Unis. Il a obtenu la médaille Fields en 1982.

    Danye Chéreau a une formation littéraire. Les surprises de la vie lui ont permis de découvrir le milieu scientifique et le monde des chercheurs sur lesquels elle porte un regard toujours curieux, amusé et attendri.

    Jacques Dixmier a professé aux universités de Toulouse, de Dijon et de Paris. Il est mathématicien « pur », mais certains de ses domaines de recherche (algèbres d’opérateurs, représentations des groupes, algèbres enveloppantes) sont utiles en mécanique quantique. Il a aussi publié des nouvelles de science-fiction. 

     

     

     

    Opér51rBet%2Bp2UL._SX195_.jpgation Lovelace - Emmanuelle Kécir-Petit - Le Pommier (Livre pour enfants) - En cours de lecture

    Hiver 2025 : un virus géant a attaqué les systèmes informatiques occidentaux. Plus rien ne fonctionne. Au Pentagone, des experts internationaux tentent de trouver une solution, le Professeur Holmes est consulté.

    Selon lui il n’y a qu’une solution : revenir en arrière et réparer le mal à la source en empêchant l’invention de l’informatique, cause de tous leurs soucis. Un programme secret du département de défense américain, baptisé « Lovelace », permettrait de voyager dans le temps et de se transporter en 1943 à l’université de Philadelphie, où a été construit le premier ordinateur.

    Nancy, une jeune fille de 12 ans, après avoir franchi un tunnel spatio-temporel, se retrouve propulsée à Londres, début juillet 1843. Le programme s'est trompé de 100 ans... Elle rencontre Oliver, un autre enfant, mais surtout Ada Lovelace, pionnière du langage informatique et Charles Babbage inventeur de la machine à différence.

    Entre passé et futur, les aventures seront nombreuses et les deux enfants découvriront la vie et les recherches d'Ada Lovelace, mathématicienne et première programmeuse informatique, discipline apparue au milieu du 20ème siècle...

     

  • « Le spectre d’Atacama » livre récent de l’académicien médaillé Fields Alain CONNES. Editions Odile JACOB

    Recension d' Edith  KOSMANEK, universitaire retraitée, membre SMF

    Abracadabrantesque, ce roman de science-fiction qui vise à donner une réponse définitive à l’éternelle question « Sommes-nous seuls dans l’Univers ?» 
    Et la réponse est NON, of course.

    Trois personnages hauts en couleurs y frétillent avec ardeur :


    Charlotte DAMPIERRE, intrépide physicienne du CERN (Genève) lancée dans une périlleuse expérimentation d’immersion dans un des détecteurs du LHC (Large Hadron Collider, 27 km), soumise à un flux hyperénergétique de protons en vue  d’obtenir, entre autres, une cartographie de son réseau de neurones cérébral ; mais elle y tombe dans un coma profond, plongée mentalement dans un « espace hilbertien » constitué d’opérateurs, chacun avec son spectre propre…


    Ali RAVI, son collègue du CERN dont il est chef informaticien ; il sauve Charlotte grâce à l'implantation d’un microprocesseur dans son cerveau, à l’aide d’un ordinateur désormais couplé
    à « une transhumaine passée par le quantique » …


    Armand LAFFORET (oui, avec 2 F) mathématicien de l’IHES (Le Bois Marie, Bures sur Yvette) spécialiste de l’analyse spectrale sous toutes ses formes, ami de Charlotte et de Rodrigo : un astrophysicien chilien à l’ALMA (Atacama Large Millimeter Array) le radiotélescope le plus puissant du monde (66 éléments, 1 milliard de dollars) implanté à plus de 5000 mètres d’altitude dans un milieu désertique où il ne pleut que 2 ou 3 fois par siècle…

    L’expérience extrême de Charlotte a généré un flux de neutrinos si intense qu’il a alerté un bolide  cosmique sphérique de 100 mètres de diamètre, non issu de notre Planète, qui croise à 4000 km/sec en se dirigeant vers notre système solaire. Il émet des spectres si singuliers captés par l’ALMA, que Rodrigo fait appel à Armand pour les analyser ; ils décident d’envoyer des tests de Turing à la sphère; la réponse est époustouflante, elle fait intervenir la correspondance bien connue depuis Riemann entre les nombres premiers et les zéros non triviaux de la fameuse fonction « dzéta » , témoignant ainsi d’une intelligence extraterrestre irréfutable.
    Avant de quitter  notre système solaire, le bolide cosmique émet un dernier message dont le décodage semble signifier ceci :« Save your souls » à savoir " Prenez garde au machine learning, concentrez-vous sur les concepts ! "

      Ce roman a le sérieux mérite d’initier le « grand public » à des concepts et des faits scientifiques variés, exotiques parfois. Quelques exemples, en vrac :
    - la fréquence du ronronnement du chat, délicieux félin, est de 24 Hz
    - l’importance fondamentale de la notion de spectre, continu ou pas.
    - la correspondance naturelle entre « formes » et « spectres de fréquences »  d'où la « musique des formes »
    - les « suites spectrales », outils cohomologiques féconds, découvertes par Jean LERAY  à l’époque   où il était prisonnier des Allemands (1940)
    - le temps de calcul polynomial pour déterminer la primalité d’un nombre , majoré par la puissance 8   du nombre de ses chiffres; résultat établi par un trio d'Indiens en 2014.
    - la nécessité d’utiliser un ordinateur quantique, non encore au point actuellement, pour effectuer la   factorisation d’un nombre composé en temps polynomial
    - l’existence d’une « spooky action at distance » qui va dix mille fois plus vite que la lumière sans  contredire le fameux principe d’EINSTEIN car il n’y a pas transfert d’information
    - l’existence d’un code LINCOS établi par le mathématicien hollandais Hans FREUDENTHAL (**) en 1960,   destiné à assurer la communication avec les extraterrestres
    - le concept de "topos" créé par le célèbre Alexandre GROTHENDIECK, une extension  du concept   d'ensemble mais avec dépendance d'un aléa; on peut y définir utilement des "chemins de vérité"
    - la possibilité de saisir l’émergence du temps à partir de l’aléa du quantique
      ( explications éclairantes dans un livre précédent d'Alain CONNES : "La théâtre quantique")
    -  etc

      Petite restriction: certains épisodes de ce roman de science fiction sont si insolites qu'ils semblent parfois relever de l'aimable fantaisie plutôt que de la savante extrapolation scientifique ! Mais je ne suis pas académicienne ...

     On glane aussi avec plaisir quelques passages poétiques où, par exemple, on magnifie le soleil
    « dont les rayons impatients peignent le monde ».
    Et pour finir dans l’allégresse, la danse frénétique de Charlotte sur le couplet cosmique suivant :

    "J’embrasserai les visiteurs voyageant depuis Bételgeuse
    J’accueillerai la légion en provenance d’Orion
    S’ils viennent d’autres galaxies, nous parlerons de biologie
    Avec ceux venant du Verseau, nous danserons un boléro
    Avec ceux des zones mythiques, nous ferons des mathématiques…"

    Bravo Charlotte ! Merci au trio CONNES-CHEREAU-DIXMIER !

    (*) assisté de son épouse Danye CHEREAU et de son directeur de thèse Jacques DIXMIER


    (**) ma thèse de mathématiques (3* cycle) est basée sur 2 articles de FREUDENTHAL

    Mail: ekosmanek@aol.com

    Site: http://kosmosya.xooit.fr/index.php